Eleaml - Nuovi Eleatici



UN’OPERA DI CARLO CATINELLI. CHI ERA COSTUI? di Zenone di Elea

Le Prince Eugène et Murat

1813-1814

OPÉRATIONS MILITAIRES NÉGOCIATIONS DIPLOMATIQUES

TOME QUATRIÈME

Avec Cartes

Ouvrage honoré des souscriptions des Ministères de la Guerre et de l’instruction Publique

PARIS

ANCIENNE LIBRAIRIE THORIN ET FILS

ALBERT FONTEMO1NG, ÉDITEUR

Libraire des Écoles françaises d’Athènes et de Rome
du Collège de France et de l’École Normale Supérieure

4, Rue Le Goff

1902

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CHAPITRE VIII

LA DERNIÈRE PHASE DE LA CAMPAGNE

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LES OPÉRATIONS SUR LA RIVE DROITE DU PÓ

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16 février 1814. — La mission du lieutenant-colonel Catinelli 

aux quartiers-généraux de Bellegarde et de Murat du 11 au 17 février 1814

Sans revenir ici sur la forme insolite choisie par Murat pour déclarer officiellement la guerre à la France, il importe cependant de remarquer que la précipitation surprenante et presque inexplicable avec laquelle, après de si longues hésitations, le roi de Naples prit tout à coup une résolution qu’il paraissait jusque-là décidé à subordonner à la réception d’une ratification que la cour de Vienne ne lui avait pas encore fait parvenir, a naturellement obligé tous ceux qui ont étudié quelque peu attentivement les événements politiques et militaires, dont l’Italie fut le théâtre en 1814, à rechercher les motifs probables de l’acte auquel Joachim venait de se résigner. On a généralement émis l’opinion que la nouvelle de l’échec essuyé par l’empereur à la Rothière, la certitude de la chute, prochaine et inévitable, du régime impérial avaient été les causes déterminantes de l’envoi de la lettre de Millet à Vignolle. Oui, les premiers revers de l’empereur ont pu, ont dû même, exercer sur l’esprit du roi de Naples une impression d’autant plus profonde que son entourage, presque exclusivement composé de personnages hostiles à la France, en profita pour lui faire entrevoir la possibilité d’arriver. malgré les proclamations des généraux autrichiens, à la réalisation de ses rêves, à la création, à la constitution d’une Italie indépendante et unie sous son sceptre. Toutefois, il nous semble qu’il convient d’attribuer à d’autres facteurs la résolution si grave et si inattendue du roi de Naples, cette résolution, d’autant plus singulière qu’il la prit au moment même où la publication des ordres du jour des généraux autrichiens lui enlevait tout crédit dans les États pontificaux, en Toscane et dans les duchés, où la résistance de l’Angleterre contrecarrait plus que jamais tous ses projets, où l’absence de toute ratification du traité du il janvier pouvait jusqu’à un certain point lui permettre de se délier d’engagements que l’Autriche et la coalition paraissaient peu pressés de garantir. Le doute et l’inquiétude avaient cependant dû grandir de plus en plus dans son esprit déjà hanté par les remords que lui inspirait sa conduite et le torturer d’autant plus profondément que, depuis la Rothière, il n’avait reçu aucune des Communications qu’on n'aurait pas manqué de lui faire tenir, si la grande armée alliée avait remporté de nouveaux avantages et avait pu continuer sa marche vers Paris.

C’est donc dans un autre ordre de considérations que, d’après nous, il convient de chercher la cause déterminante de cette manifestation désormais irréparable; en un mot, la notification faite par ordre du roi de Naples par le général Millet au général Vignolle a été, croyons-nous, presque exclusivement motivée et provoquée par la mission du lieutenant-colonel Catinelli, par l’arrivée à Bologne le il février de cet officier que, malade, il n’avait pu recevoir à ce moment, par le départ pour Vérone et Villafranca de ce mandataire de lord William Bentinck, enfin et surtout par l’imminence de son retour.

En raison même de l’importance toute particulière du rôle joué par Catinelli pendant les journées du il au 17 février, de l’influence que ses entrevues et ses conférences exercèrent sur le reste de la campagne et sur la destinée même de Murat, avant même de parler de sa mission, il est absolument indispensable de retracer en quelques lignes la vie si bien remplie de cet ardent patriote, de ce fidèle serviteur de son pays qui a fait autant, et peut-être même plus, pour l’Autriche que les Schifi et les Liìtzow pour l’Allemagne, de résumer la carrière de cet officier, plein de talent et d’intelligence, que ses blessures ont seules empêché d’arriver à une haute situation militaire et qui, malgré l’oubli dans lequel on a laissé son nom, joua un rôle prééminent et hors de proportion avec son grade dans les graves événements qui se déroulèrent en Italie pendant l’hiver de 1814.

Quelques historiens ont bien cité son nom; mais, sans même prendre la peine de rechercher d’où venait le personnage que lord William Bentinck chargeait, au moment le plus critique de la campagne de 1814, de le représenter auprès du roi de Naples et du feld-maréchal comte Bellegarde, ils se sont contentés de déclarer, en se basant sur la désinence italienne de son nom qu’il ne pouvait s’agir que d’un officier sarde ou piémontais au Service de l’Angleterre.

Le fait même que le nom de Catinelli parait, à notre connaissance, à deux reprises dans la correspondance de Napoléon, aurait cependant dû suffire pour appeler leur attention, éveiller leur curiosité et peut-être leur épargner cette erreur.

Dès le 21 mars 1797, le jour même de son entrée à Goritz, le général Bonaparte, après avoir décidé (art. 2 de sa proclamation au peuple de la province de Goritz: quartier-général de Goritz, l(er) germinal an V; Correspondance. t. II, n° 1609) que «les provinces de Goritz et de Gradisca seraient provisoirement administrées par un corps composé de 15 personnes qui portera la dénomination de «gouvernement central», avait désigné parmi ces 15 personnes un certain Carlo Catinelli, probablement le père du futur chef d’état-major de lord William Bentinck.

Dix ans plus tari, l’empereur écrivant de. Saint-Cloud, au vice-roi, le 25 août 1807 (Mémoires du prince Eugène, t. III, 392) avait eu l’occasion de reparler une deuxième fois d’un Catinelli:

«Donnez-moi, lui dit-il des renseignements sur ce Schepeler et ce Catinelli qui me paraissent être de fort mauvais sujets.»

Or, cette fois (tel est du moins l’avis de Son Excellence le feldzeugmeister baron de Catinelli qui me permettra de lui exprimer ici ma profonde et respectueuse reconnaissance pour la bienveillance avec laquelle il a bien voulu me fournir tous les renseignements relatifs ((1)) à la carrière et à la vie de son pere), il est presque absolument certain qu’il s’agit déjà de l’officier dont l’ardent patriotisme n’a fait que croître après chacune des blessures qu’il reçut en combattant contre nous et qui, obligé de quitter le Service actif, n’en consacra pas moins toutes ses forces, toute son activité à la défense de sa patrie, démembrée, humiliée, déchue de son ancienne splendeur et sur le point de disparaître de la liste des nations.

Le colonel Catinelli a été, on ne saurait essayer de le nier, un ennemi acharné, un adversaire irréconciliable de l’hégémonie française, non pas par haine de la France, mais parce qu’il n’y avait place dans son cœur que pour deux sentiments également élevés, la fidélité envers son empereur et l’amour de. son pays qu’il voulait revoir grand et puissant. Par une cruelle bizarrerie du sort, l’homme qui avait été un des Instruments les plus actifs du rétablissement de la domination autrichienne en Italie devait encore avant la fin d’une vie bien longue et encore mieux remplie, assister à l’effondrement définitif de l’œuvre à laquelle il s’était voué avec tant d’ardeur, à la formation, à la constitution du royaume d’Italie, à la création de l’unité et de l’indépendance italiennes, à ce risorgimento qu’il avait déjà vu poindre au commencement de sa carrière.

Charles Catinelli naquit à Goritz, le 30 mars 1780, de parents appartenant à la bourgeoisie de cette ville. Après avoir suivi les cours, d’abord du gymnase de Goritz, puis de l’Université de Vienne, il avait à peine dix-sept ans lorsqu’en 1797 l’empereur François décréta la levée générale. Catinelli fut des premiers à se présenter comme volontaire. Élève à l’Académie du Génie de 1797 à 1799, il en sortit le l(ep) décembre de cette année avec le grade de sous-lieutenant au régiment d'infanterie Archiduc François-Joseph n° 63 (aujourd’hui régiment d’infanterie Baron von Merkel, n° 55). Envoyé à l’armée d’Italie, il prit part successivement au combat de la Gravina (18 mai 1800), puis, le 14 juin 1800, à la bataille de Marengo où il reçut une forte contusion. Sa brillante conduite à Marengo lui valut, deux jours après la bataille du Mincio (24 décembre 1800), d’être nommé, le 26 décembre, lieutenant à l’état-major du quartier-maître général. Quelques jours plus tard il se distinguait encore, les 1(er) et 2 janvier 1801, aux j combats de Madonna della Corona et d’Aia.

Employé à l’établissement et à la confection de la carte d’Italie, nommé capitaine en 1805, Catinelli se couvre de gloire à la bataille de Caldiero (30 et 31 octobre 1805), au point de mériter une mention particulière de l’archiduca Charles dans la relation même que ce prince établit aussitôt après la bataille (2).

D’après un rapport rédigé par le général Nordmann, rapport qui se trouve au K. und K. Kriegs-Archiv (1807, H. K. R. 198/6), le capitaine Catinelli s’offrit volontairement, le 30 octobre 1805, pour rétablir le pont du Fibbio coupé par les Français. Le général Nordmann mit à cet effet à sa disposition 50 hommes du régiment des confins militaires de Gradisca (dissous en 1873), à la tète desquels malgré le feu terrible dirigé contre lui et son petit détachement, le jeune capitaine réussit à jeter un pont sur ce cours d’eau.

Le lendemain, 31 octobre 1805, les Français forcèrent le passage de l’Adige à Zevio, chassant devant eux les deux compagnies postées sur ce point. Au bruit de la fusillade, Catinelli, qui était occupé à ce moment à établir une communication du côte de la Chiavica del Cristo accourt au galop. Il trouve les Francis en train d’attaquer le pont de Zevio. Les 2 compagnies chargées de la défense du pont (une du régiment des confins militaires de Gradisca, l’autre des grenadiers Archiduc-François-Charles), privées de leurs officiers qui, tous, avaient été mis hors de combat sont sur le point de perdre contenance. Catinelli se met à leur tète, relève leur courage, les reporte en avant et réussit à arrêter les progrès des Français qu’il tient en échec jusqu’à l’entrée en ligne du reste du bataillon de grenadiers Archiduc-François-Charles. Aussitôt après l'arrivée de ce renfort, il reprend l’offensive, oblige les Français d’abord à céder le terrain qu’ils avaient gagné, puis à renoncer définitivement à leur entreprise. Mais malheureusement pour lui le capitaine Catinelli avait été si grièvement blessé à la cuisse que ce jeune officier plein d’avenir et à peine âge de vingt-cinq ans se vit forcé de se retirer du Service.

C’est de cette époque que date la grande intimité qui s’établit entre lui et celui qui n’était alors que le lieutenant-colonel et qui devait devenir plus tard le feld-maréchal Lavai, comte de Nugent. En février 1807, Catinelli admis à la retraite comme Real-Invalid3 et nommé major, était pourvu en même temps d'un emploi aux Archives de la Guerre

En 1808, lorsqu’on procéda en Autriche à l’organisation de la landwehr, Catinelli, rappelé à l’activité et nommé major à la suite du régiment d’infanterie baron von Reisky (aujourd’hui régiment d’infanterie comte Starhemberg, n° 13), fut attaché ’à la personne de l’archiduc Maximilien d’Este. Celui-ci, qui avait déjà remarqué le zèle et l’intelligence déployés par Catinelli pendant la période d’organisation de la landwehr, ne put se défendre d’une réelle admiration pour l’officier qu’il vit, en dépit de sa blessure encore mal guérie, faire à ses côtes une partie de la campagne de 1809 et qui, oubliant ses souffrances, trouva encore moyen de se distinguer à Abensberg, à Eckmuhl et à Ratisbonne. A bout de forces et terrassé par la douleur, Catinelli dut, encore une fois, demander sa mise à la retraite. Elle lui fut accordée en juillet 1810, mais cette fois avec le caractère de lieutenant-colonel (3).

Après la prise de Vienne, en attendant la liquidation de sa retraite, Catinelli était resté pendant quelques temps encore auprès de l’archiduc Maximilien. Mais, lorsque, à la signature de la paix, sa ville natale eut été cédée à la Franco, lorsqu’il se vit à la veille d’être contraint de renoncer à sa nationalité, Catinelli, ne voulant à aucun prix porter les armes contre sa patrie, et sachant que les Anglais étaient en tram do créer une légion anglo-italienne, prit la résolution d'offrir ses Services au gouvernement britannique. Le 30avril 1812, il résignait sa chargé et se rendit avec une caravane, à laquelle s’adjoignit le général-major comte Nugent et qui traversa le territoire turc, par Bosna-Serai à Durazzo où il s’embarqua peu de temps après à bord d’un bâtiment anglais qui le conduisit à Palerme.

Admis dans l’armée anglaise avec le grade qu’il possédait dans l’armée autrichienne, Catinelli, à peine débarqué, fut chargé par lord William Bentinck de l’inspection des ouvrages de défense des côtes de la Sicile.

Placé presque aussitôt à la tête de 2 régiments italiens, il ne tarda pas à passer en Espagne avec le corps d’armée anglo-sicilien sous les ordres de ce général. On le retrouve à ce moment, d’abord à l’attaque de San-Felipe de Balaguer, puis au siège de Tarragone. Après la levée de ce siège, Catinelli revient en Sicile avec son chef. Son retour à Palerme coïncide avec l’arrivée presque incessante de déserteurs, de réfractaires italiens et napolitains qui, tous, affirmaient que le mécontentement était si grand et si général en Italie qu’il suffirait de jeter quelques troupes sur les côtes de Toscane pour provoquer un soulèvement général. Ce fut à ce moment que, cédant aux prières de Catinelli, lord William Bentinck, comme il l’expose dans une de ses dépèces à lord Bathurst en date des premiers jours de novembre 1813, consentit à lui confier un millier d’hommes de la légion italienne et à le laisser s’embarquer à Milazzo. Comme nous avons eu l’occasion de le dire au chapitre VI, bien que le coup de main tenté sur la Toscane ait échoué par suite du manque de concours des populations, bien que Catinelli, après avoir débarqué à Viareggio, après être entré à Lucques et avoir été sur le point de s’emparer de Livourne, ait dû ramener son monde en Sicile, il est bien certain que cet insuccès ne lui nuisit en aucune façon dans l’esprit d’un chef, cependant peu disposé à l’indulgence envers ses subordonnés maladroits ou malheureux.

Revenu à Palerme dans les tout derniers jours de décembre 1813, Catinelli, après avoir rendu franchement et loyalement compte à lord William Bentinck du résultat négatif de son entreprise, loin de tomber en disgrâce et de perdre la confiance du lord capitaine général fut, au contraire, au nombre des rares personnages que celui-ci consulta ou qu’il tint au courant des négociations entamées avec le feld-maréchal-lieutenant comte Neipperg, puisque ce fut précisément de Catinelli que le général anglais fit choix, lorsqu’il crut le moment venu d’envoyer auprès du roi de Naples et du feld-maréchal comte de Bellegarde un officier de confiance chargé bien moins de discuter avec eux le pian de leurs opérations combinées que de leur-faire accepter, en même-temps que ses idées, certaines modifications dont il faisait la condition sine qua non de sa coopération.

Après avoir rejoint lord William Bentinck à Naples, où il lui avait donne rendez-vous, Catinelli remplit les fonctions de chef d’état-major général du corps anglo-sicilien qui débarqua en Toscane et s’empara de la Spezia et de Gènes (4). La prise de cette dernière place lui valut le grade de colonel. Au bout de quelques semaines, il dut se rendre à Vienne et s’acquitter, par ordre de Bentinck, d’une nouvelle mission politique auprès du général comte de Ficquelmont, aide de camp général du feld-maréchal comte de Bellegarde (5) .

Envoyé à Londres par lord William Bentinck en janvier 1815, Catinelli en revint en toute hâte à la première nouvelle du débarquement de Napoléon en France et fut appelé par ce général, qui l’investit des pleins pouvoirs les plus étendus, à diriger la mise en état de défense de Gènes.

En 1816, lorsqu’on résolut de cesser les travaux, Catinelli quitta le Service, définitivement cette fois, et rentra à Goritz où il se maria en 1818. Son repos ne fut cependant pas de longue durée. Moins de trois ans plus tard, en 1821, ce fut à lui qu’on eut recours lorsqu’on voulut organiser l’école militaire de Modène. Anobli par le duc de Modène, il revint, en 1824, se fixer à Goritz, où il consacra ses loisirs à l’étude des questions agricoles.

Les événements de 1848 l’arrachèrent, une fois de plus, à sa tranquillité et à ses fonctions de Président de la Société d’Agriculture. Il commença par accompagner en Vénétie son vieil ami, le feld-maréchal comte Nugent, et il resta auprès de lui jusqu’au moment où il dut se rendre à Vienne pour représenter au Reichstag la ville de Goritz.

Le colonel Catinelli, qui avait publié, entre temps, de nombreuses brochures consacrées à l’étude des questions agricoles et écrit, quelque temps après le Congrès de Paris de 1856, un livre intitulé Studi Sulla Questione Italiana (((6))), livre qui, dans le principe, n’était pas destiné à la publicité, mourut à Goritz, entouré de la vénération de ses concitoyens le 27 juillet 1869, dans sa quatre-vingt-dixième année.

Ce sont les différentes pièces, inconnues jusqu’à ce jour, ces pièces qui retracent jour par jour et presque heure par heure les différentes péripéties de cette importante mission, ces pièces que nous avons eu la bonne fortune de retrouver, les unes au Record Office, les autres aux Archives Impériales et Royales de la guerre, à Vienne, que nous allons reproduire après avoir retracé, dans les quelques lignes qui précédent, la longue vie du colonel Catinelli.

«Nous arrivâmes, le général comte de Neipperg et moi, écrit Catinelli à Bentinck (7), le 11 février, à Bologne, où était établi le quartier-général de l’armée napolitaine, et où il y avait même le roi de Naples. Je fus chez le due de Gallo qui me reçut avec beaucoup de distinction et qui me dit que le roi, prévenu que je devais arri ver à Bologne, lui avait montré le désir de me voir; qu’ainsi il me ferait savoir l’heure de l’audience. Mais le roi venait d’avoir une petite attaque de fièvre, et il n'y eut pas pour ce jour-là plus question d’audience.

«Je vis en attendant le même jour le comte de Nugent, au quelle parlais de la coopération du corps britannique, de la nécessité de lui donner la main pour venir à terre, de l’occupation exclusive de la Toscane et de la rivière de Génes, et finalement du détachement britannique qu’il avait sous ses ordres et que lord William Bentinck voulait, une fois débarqué, attirer à lui. Je lui parlai aussi de ce qui paraissait le plus convenable pour nous aider à mettre pied à terre.

«Le comte de Nugent venait de Modène qu’il avait occupé, ainsi que Reggio, au nom de l’archiduc François d’Autriche-Este pour engager le roi à avancer avec ses Napolitains; mais le roi lui fît dire qu’il ne se sentait pas en état de le voir, et il partit le même jour pour Modène après cependant avoir parlé avec le chef d’état-major de l'armée napolitaine.

«Quant au comte de Neipperg, tant lui que le comte de Mier se donnaient auprès du due de Gallo beaucoup de mouvement pour obtenir du roi les changements au traité de Naples que le prince de Metternich venait de demander et pour obtenir aussi une déclaration séparée que le roi de Naples accédait d’avance aux dispositions que les alliés prendraient pour l’Italie.

«C’était assurément un calice bien amer à présenter au roi, et c’est cette circonstance qui empêcha le comte de Neipperg de faire, comme nous en étions cependant convenus, la moindre mention au due de Gallo de notre coopération et des conditions sur lesquelles elle se basait et sur l’occupation exclusive de la Toscane et de la rivière de Gènes par les troupes britanniques, occupation qui cependant se ferait pour la Toscane au nom de l’archiduc Ferdinand, frère de l’empereur d’Autriche. J’ai eu beau presser le comte de Neipperg; il s’excusa avec la maladie du roi et me remit au lendemain.

«Le 12 se passa comme le 11 sans rien faire qui eût rapport à la Toscane et à notre coopération. En attendant, le temps passait, et, comme je devais être de retour à Naples le 20, je pris le parti d’aller au quartier-général de l’armée autrichienne et de me remettre dans les mains du maréchal comte de Bellegarde. J’écrivis la minute ci-jointe (Voir plus loin la pièce intitulée: Minute présente e par le lieutenant-colonel Catinelli au maréchal comte de Bellegarde à Villafranca le 15 février et préparée à Bologne le 12), pour la présenter au maréchal et je partis pour Vérone et Villafranca le 13 au matin.

«J’arrivai à Vérone le 14 au soir. Il faisait fort tard et je m’y arrêtai pour partir le lendemain de grand matin.

«Le 15, avant de quitter Vérone, j e vis le comte de Neipperg, qui venait d’arriver de Bologne et qui me dit que le roi avait signé tout, qu’il lui avait aussi parlé de la Toscane, que le roi tenait beaucoup à l’occupation de ce pays mais qu’il ne s’opposait pas à ce que l’escadre anglaise s’arrêtât dans le port de Livourne, qu’il favoriserait nos achats de vivres, etc., etc.

«Je fus, comme de raison, entièrement choqué de tout cela et je ne manquai pas d’observer au comte de Neipperg qu’il s’agissait ici de tout autre chose que d’être souffert par les Napolitains dans la rade de Livourne, être partis sur cela pour Villafranca où je remis au maréchal comte de Bellegarde la lettre de lord William Bentinck et, do plus, la minute susmentionnée.

«Le maréchal la lut sur-le-champ, et nous commençâmes tout de suite à la discuter. J’ai aperçu dans l’âme du maréchal une forte agitation. La bataille que venait de lui livrer le vice-roi avait fortement agi sur son esprit. Lorsque celui-ci crut apercevoir dans le roi de Naples des intentions hostiles, il abandonna les lignes de l’Adige et se replia sur celle du Mincio. Le maréchal crut que le vice-roi marcherait sur Alexandrie; mais il se trompa. L’ennemi occupa en force Monzambano et s’y retrancha, garda une tète de pont sur la rive gauche du Mincio. Il avait aussi, outre Peschiera, une tète de pont à Goito puis Mantoue où était le gros de son armée et une tète de pont à Borgoforte. Il s’était préparé a attaquer le maréchal, dès que celui-ci aurait passé avec le gros de son armée le Mincio, et à l’attaquer non pas sur la rive droite, mais sur la rive gauche. Le maréchal, malgré sa prudence et sa prévoyance, donna entièrement dans le piège. Il passa avec le gros de son armée le Mincio le 8, repoussa quelques bataillons ennemis qui se présentèrent, et reconnut la position de Monzambano. On prit un capitaine français, qui avertit le général que les Autrichiens feraient bien d’avoir les yeux ouverts sur la route de Mantoue à Villafranca et que le vice-roi s’était préparé à faire une furieuse sortie. Le capitaine avait dit vrai; car, si je ne me trompe, l’ennemi vint, avec deux fortes colonnes, attaquer le tiers de l’armée autrichienne qui, n’ayant pas encore passé le Mincio, avait pris une position perpendiculaire sur cette rivière avec la droite à Pozzolo et la gauche sur Mozze-cane. Le combat fut très opiniâtre et décidé par l’héroïsme du corps de réserve qui, se battant contre quatre fois plus de monde qu’il n’était, ne perdit cependant pas un pouce du terrain. L’ennemi fut repoussé avec grande perte. Celle des Autrichiens se monta à 5.000 hommes et dans le nombre on perdit entre tués et blessés un millier de grenadiers. Un bataillon autrichien, qui venait d’arriver à l’armée, et qui n'entrait pas dans l’ordre de bataille, s’égara et vint tomber au milieu de l’armée ennemie. Ne voulant pas se rendre, il fut presque entièrement détruit.

«J’arrivai donc au quartier-général dans un moment où l’on était assez démonté. Sir Robert Wilson me dit que cette campagne d’hiver avait ruiné l’armée; qu’elle avait près de 23.000 hommes à l’hôpital (8) et d’autres personnes me firent une peinture affreuse du désordre et du manque de discipline de l’armée. D’après sir Robert Wilson, l’armée autrichienne, si effectivement d’une manière ou d’une autre, le vice-roi se retirait sur Alexandrie, ne pourrait le suivre, après avoir détaché pour bloquer Legnago, Peschiera et Mantoue, sans compter le corps du comte de Nugent, qu’avec 22.000 combattants, sans compter les officiers.

«Le maréchal, après infiniment de protestations, me dit qu’il ne pourrait pas nous donner la main pour venir à terre; que, quand nous serions débarqués, il nous enverrait 400 chevaux; qu’il manquait d’officiers du génie; qu’il nous enverrait 30 sapeurs; que la coopération de lord William Bentinck était de la plus grande importance, mais qu’elle devrait se faire en débarquant au golfe de la Spezia; que, quant à l’occupation de la Toscane, les Napolitains l’avaient déjà occupée et qu'il ne pourrait pas se charger d'aucune manière de traiter avec le roi de Naples pour l'engager à remettre le pays aux Anglais; qu’il espérait bientôt lier notre opération à l’opération de son armée; mais que, en attendant et au commencement, l’opération de lord William Bentinck devait se considérer comme isolée.

«Le maréchal me parla souvent et à différentes reprises de la situation embarrassante et compliquée dans laquelle il se trouvait, m’assurant en mème temps que l’arrivée de lord William Bentinck à la Spezia pourrait diminuer de beaucoup l’embarras et les difficultés de la situation.

«Arrivés, en discutant la minute, à la ligne d’opérations sur la rive gauche du Pò, il parla avec chaleur de la différence des circonstances et sur ce que la base de ma remarque (une grande supériorité de forces) (voir la Minute du projet d'opérations présente par Catinelli à Bellegarde) était fausse.

«J’insistai à ce qu’on m’envoyât bientôt une réponse définitive.Le maréchal me dit qu’il devait attendre le comte de Neipperg qui ne manqua pas d’arriver le mème matin et l’on vint à une décision.

«Le maréchal resta ferme dans l’idée que l’opération de lord William Bentinck devait d’abord se considérer comme isolée; que lord William Bentinck arrangerait lui-mème ses affaires avec le roi de Naples; que lui, le maréchal, il détacherait, dès que lord William Bentinck serait à terre, 400 chevaux et les sapeurs.

«Le soir, il me fit dire, par le comte de Neipperg qu’il écrivait au roi de Naples pour le décider à évacuer une partie de la Toscane, mais je protestai en disant que je parlerai moi-même au roi de Naples (9)).

«Sir Robert Wilson me recommanda beaucoup de tâcher, étant à Bologne, de mettre autant que possible au net l’affaire de la Toscane et me lut un passage de la lettre que je lui avais remise de la part de lord William Bentinck, dans lequel on voyait l’importance que lord William mettait à cette affaire et le désir que là-dessus le comte de Neipperg et mème moi nous agissions auprès du due de Gallo et du roi de Naples.

«Le 17 février, j’étais de retour à Bologne. Le comte de Mier me dit que le roi voulait me voir. J’y fus.

«Le roi m’assura que le comte de Neipperg ne lui avait pas parlé de l’arrivée de lord William Bentinck en Toscane; que les Toscans l’avaient invité et prié à genoux d’occuper le pays; qu’il avait préservé ce pays de l’anarchie et des horreurs d’une guerre d’insurgents (sic); que les Toscans étaient très contents de son administration; qu’il n’avait pas de subsides et que, sans la Toscane, il ne serait pas en état de faire la guerre hors de son royaume; qu’il nous livrerait Livourne dès qui l’aurait pris; que, si lord William Bentinck voulait débarquer au golfe de Spezia, il y ferait marcher 5.000 hommes pour lui donner la main.

«Je représentai au roi qu’il nous fallait, pour nous mettre en état de coopérer de la manière qu’on le désirait, une maison où nous puissions être entièrement chez nous. J’insistai sur cette nécessité et aussi sur la dignité et l’honneur des armes britanniques, observant en même temps qu’il ne peut y avoir aucune raison pourquoi les Anglais, seuls de tous les alliés, feraient la guerre en Italie, sans occuper militairement un terrain suffisant à servir de base à leurs opérations, à nourrir les troupes qui débarqueraient et toute la marine qui pourrait seconder leurs opérations; et je finissais toujours par dire qu’une maison, où nous pourrions être parfaitement chez nous, nous est indispensable sous tous les rapports.

«Le roi sur cela me parla d’un arrondissement autour de Livourne: à quoi je répondis que nous étions d’assez grands seigneurs pour avoir droit à toute une maison sans être bornés au rez-de-chaussée ou à l’entresol (10).

«Le roi ne manqua pas de reconnaître la raisonnabilité (sic) de la chose et opposa seulement la difficulté pour lui et l’inconvenance (sic) de quitter un pays où il avait été appelé et, pour ainsi dire, entraîné, un pays qu’il avait provisoirement organisé et qui était administré par des employés napolitains.

«J’accordai au roi que l’évacuation de la Toscane avait pour lui des inconvénients; mais je lui observai que si, de son côte, il y avait des inconvénients, du nôtre il y avait une nécessité impérieuse, qu’il nous fallait une maison, et que lord William Bentinck n’en démordrait sûrement pas.

«Le roi me parla ensuite que, n’ayant pas de subsides, le revenu de la Toscane lui était d’autant plus nécessaire que non seulement il remplirait les engagements pris avec l’Autriche, mais qu’il irait au delà et qu’il venait d’ordonner une augmentation de son armée de 20.000 hommes.

«Tous ces pourparlers se firent avec beaucoup de calme et on y avait l’air de gens qui cherchent à convenir de ce qui est juste et propre. Aussi le roi finit-il par me déclarer qu’il désirait que lord William Bentinck pesât les titres que lui (le roi) avait sur la Toscane et que, du reste, il se remettait à sa décision.

«Je croyais que cette matière était d’une certaine manière finie et arrangée, lorsque le roi, ayant l’air de se ressouvenir d'une chose qui lui était beaucoup à cœur et qu’il avait oubliée, me dit que, dans tous les cas, il attendait de la galanterie anglaise (ce sont ses propres termes) que l’on ne troublerait pas sa belle-sœur qui était à Lucques et qu’on la laisserait tranquillement en possession de sa principauté de Lucques; que ce pays n’appartenait pas à la Toscane; que la princesse était enceinte et ne pourrait voyager; que lui (le roi) lui avait offert un asile à Naples, mais qu’elle s’y était refusée ((11)).

«Ma surprise a été extrême et j’ai déclaré au roi que je ne savais absolument que répondre; que je n’y étais pas préparé du tout; que je n’avais là-dessus aucune instruction, que lord William Bentinck et on général tous les alliés seraient extrêmement étonnés d’une demande si entièrement inattendue et que j’avais toutes les raisons de croire qu’on s’y refuserait absolument.

«Le roi me rappela qu’il comptait sur la galanterie anglaise; et moi je répondis que l’on fait chez nous fort peu profession d’être galant. Le roi corrigea en disant qu’il aurait du dire honnêteté anglaise.

«J’ai tâché de porter le roi à quelque explication ultérieure; mais il s’y refusa avec adresse. Toutefois, j’ai pu clairement distinguer son envie de ménager sa famille et d’user envers la sœur de Bonaparte d’une manière à se faire un mérite auprès de Bonaparte lui-même et de lui prouver par cet acte que les liens, qui existaient entre eux, n’avaient pas entièrement cessé.

«Le comte de Mier, ministre d’Autriche, était présenté cette audience et essaya quelquefois de se mêler de la conversation; mais, autant le roi était-il mesuré en parlant avec moi, autant s'échauffait-il sur les remarques et les interlocutions du comte de Mier, et il ne passa rien à celui-ci.

«Le comte de Mier m'avait prié qu’étant chez le roi, je tâché d’amener le discours sur les opérations du maréchal de Bellegarde et particulièrement sur la nécessité que le roi fit, en se portant rapidement en avant, une forte diversion en faveur du maréchal. Le roi en parla de lui-mème, me montrant sur la carte la position du vice-roi, le pont de Borgoforte et la facilité qu’avait celui-ci de passer rapidement le Po, de l’attaquer avec des forces très supérieures, de le battre ou, au moins, de l’obliger à une prompte retraite, et puis de se reporter sur Bellegarde.

«Comme ce que disait le roi n’était que trop vrai, et le roi me demandant ce que j’en pensais et me priant de lui dire librement si je croyais que les circonstances lui permettraient de s’avancer plus en avant, j’ai dû, pour ne pas avoir l’air d’un imbécile, ce qui n’aurait servi à rien, j’ai dû convenir qu’il ne pouvait pas avancer, observant toutefois qu’il pourrait avancer dès que l’on conviendrait d’une opération offensive, où chacun sût le rôle qu’il aurait à jouer.

«Il n’y aurait aucun inconvénient pour le maréchal de passer avec toutes ses forces, sans les disséminer par des détachements de bloquade (sic) et d’observation et ayant uniquement une garnison à Vérone, do passer le Mincio et de se poster entre Monzambano et Mantoue, divisant et séparant ainsi les deux corps ennemis et de commencer une attaque en régie contre le camp de Monzambano. en ouvrant mème des tranchées, s’il le fallait, et y employant toute l’artillerie de siège. Cela occuperai! assez le vice-roi, qui devrait se borner à dégager le corps de Monzambano et ne songerait aucunement à une offensive sur la rive droite du Pò. Le vice-roi pourra par des partis inquiéter la communication de l’armée avec Vérone; mais le maréchal pourra en passant le Mincio avoir pour huit jours de vivres avec soi et pourra facilement se passer de cette communication pendant tout le temps de cette opération.

«Tenez-moi, dit le roi, ce langage et j’avancerai sur le champ jusqu'à Alexandrie, s’il le faut; mais il faut un pian, il faut de l'accord, il faut que les opérations se fassent comme s’il ri y avait qu’un général.

«Je fis après mention au roi d’une opération sur la rive droite du Pò dans le sens que j’en avais parlé au maréchal. Je racontai aussi au roi l’objection du maréchal que les circonstances étaient bien différentes, qu’alors le pays de Venise était une barrière respectée qui, par sa neutralité, couvrait les opérations du prince Eugène de Savoie, que lui, le maréchal, risquait de devoir accepter une bataille le front renversé. Le vice-roi tâcherait à toutes jambes de gagner Alexandrie et nous l’aurions bientôt borné à ce coin-là.

«Le roi entra ensuite dans une autre chambre pour chercher une carte et ramener le due de Gallo. Quelques minutes après, le due entreprit le comte de Mier et s’éloigna de nous.

«Le roi me mena à une fenêtre et s’entretint bien longtemps.avec moi en ayant l’air de s’ouvrir à moi sur ses intérêts et sur l’esprit qui l’animait.

«Je ne sais pas, dit-il, les intentions de l’Angleterre envers moi. J’ai été très étonné des difficultés qu’on a eues de m’accorder un armistice.»

«Je répondis que l’Angleterre était l’alliée naturelle du royaume de Naples; que les intérêts des deux nations les portaient à se rapprocher; que les difficultés avaient été causées par des formés auxquelles on tient beaucoup en Angleterre; qu’une fois que l’armée napolitaine aura bien mérité de la cause commune, on ira en Angleterre au-devant de ses désirs; que les intérêts de toute l’Europe exigeaient qu’il y eût à Naples un gouvernement fort; que cette raison l’emporterait bientôt sur les préjugés; que c’était au gouvernement de Naples à protéger et à servir d’égide à toute l’Italie; que j’étais un Italien et que pour moi je ne pouvais désirer autre chose, sinon de voir une alliance très étroite entre le roi de Naples et la Grande-Bretagne.

«Le roi me fit sur cela des ouvertures qui m’étonnèrent. Il me prit fortement par le bras et me dit:

«Certainement, j’ai tout à craindre et mon trône est bien chancelant aussi longtemps que je serai en guerre avec l’Angleterre. Je tiendrai si l’on m’attaque et j’étonnerai le monde. Mais je succomberai, tandis qu’avec l’Angleterre je résisterai à toutes les puissances du continent. Je dois beaucoup à mon peuple; il m’aime et m’a porté des sacrifices; leur bonheur m’est sacré. Pour l’Italie, cette nation mériterait certainement un meilleur sort que celui que lui prépare l’Autriche. Il n’y aurait que l’Angleterre qui pourrait empêcher le mal que certainement on y fera. J’aime beaucoup les Italiens. Ils ont été la première nation du monde et pourraient encore reprendre leur rang.»

«Les derniers mots que me dit le roi roulèrent sur ce qu’on lui avait dit que lord William Bentinck lui faisait un crime d avoir fait la campagne de Dresde et de Leipzig. «Mais comment, dit-il, aurais-je pu m’y refuser? J’étais à Dresde dans la persuasion que l’empereur ferait la paix. Je ne pouvais pas concevoir ce qui l’engagerait à mettre encore une fois l’Europe sur une carte. Je me suis trompé et il a fallu se battre… Si lord William Bentinck connaissait à fond ma situation, il verte rait que je ne pouvais faire autrement.»

«Il dit après des choses dans un sens que je n’ai pas pu débrouiller et qui me firent douter qu’il y avait eu, avant le départ de lord William Bentinck pour l’Espagne (12) , des négociations entamées entre lui et le gouvernement anglais. Il dit positivement les mots suivants: «C’est plutôt à moi de me plaindre de lord William Bentinck. Il aurait certainement pu m’épargner la dernière campagne (13)

«Il me dit aussi, je ne sais plus exactement, que:

«Quand on est sur le trône de Naples, il faut être aveugle pour ne pas s’apercevoir qu’il est de tonte nécessité d’être bien avec l’Angleterre((14)).

«Je passai ensuite chez le comte de Mier avec le comte... qui m’y accompagna et j’écrivis au comte de Nugent le résultat de ma conversation avec le roi par rapport à la Toscane, comme aussi la nouvelle histoire de la principauté de Lucques, et je le priai de mettre au fait de tout cela sir Robert Wilson.

«Pendant mon voyage et pendant le séjour que j’ai fait au quartier-général autrichien, à Villafranca, et au quartier-général napolitain, à Bologne, et en passant par Arezzo, Florence, Rome et Naples, je n’ai laissé échapper aucune occasion pour me procurer une idée de l’esprit des armées et des peuples,et je pense avoir pu me procurer des notions assez exactes sur tout cela.

«Le pays occupé par les Autrichiens est très mal administré; les impôts et les taxes sont énormes, comme sous les Français, avec beaucoup de 'désagréments et de violences inconnues mème sous les Français.

«L’armée autrichienne gâte autant qu’elle consommé. Il n’y a pas d'ordre, et l’armée est très indisciplinée. Malgré cela, il s’en faut de beaucoup que l’on soit aigri contre les Autrichiens. On leur pardonne tout. On se permet seulement de désirer qu’ils évacuent au plus tot.

«Le vice-roi a gagné tous les cœurs, et on l’admire généralement. On déteste et on hait les Français, surtout à cause de la conscription; mais on fait toujours une exception en faveur du vice-roi.

«Le pays occupé par les Napolitains est supérieurement bien administré; les impôts ont été diminués et le roi de Naples accorde de temps en temps de nouveaux soulagements qui ne manquent pas de le rendre presque populaire. Ce qui diminue la popularité de l’administration napolitaine, c’est que les employés romains et toscans ont été pour la plupart tirés de la classe, dite des Jacobins, et il y eut sur cela, surtout en Toscane, un cri général. Mais le roi a eu le bon esprit de céder aux cris du public, et, par un nouveau règlement publié en Toscane, la plus grande partie des fonctionnaires sera tirée des nationaux mémes et élue par les communes. On se plaignait en Toscane des ménagements des Napolitains pour les Français et de la suppression de la proclamation du maréchal comte de Bellegarde, par laquelle on promet aux Toscans le retour du grand-duc. Cette proclamation avait été imprimée à Florence et affichée à tous les coins. Mais les Napolitains mirent en prison l’imprimeur et ôtèrent les affiches avec beaucoup de soin.

«On est moins mécontent des Napolitains à Rome qu’à Florence. Il y a beaucoup d’ordre dans les affaires. On a diminué le prix du set et on a eu le bon esprit de publier les affiches avec les armes du pape. A cette apparition les habitants de Rome devinrent comme fous. Tout le monde courait sur la rue pour voir les affiches et la populace surtout baisait les armes du pape en jetant des cris de joie. On m’a dit qu’on ne pouvait rien s’imaginer de plus touchant.»

Enfin, avant de terminer ce rapport, Catinelli enregistre encore des renseignements qu’il était personnellement intéressé à recueillir:

«En passant par la Toscane, ajoute-t-il, je n’ai pas pu m’empêcher de m’informer sur l’expédition qui débarqua en décembre à Viareggio, puis à Livourne, et j’eus le chagrin d’entendre des horreurs sur mon compte. Il avait, me dit-on, très bien commencé, il mit l’alarme et l’épouvante dans tous les Francis qui étaient en Toscane et ils s’occupaient tous de faire leurs paquets. Il mit en déroute les troupes avec lesquelles on s’approcha de lui: mais tout d’un coup il perdit la tète et s’embarqua au moment où la ville de Livourne allait capituler.

«Un maître de poste me dit que le commandant qui fit une si belle chose n’était pas un Anglais, mais un Italien au Service britannique.

La minute, dont Catinelli parie dans le rapport que nous venons de reproduire, présente dans un autre ordre d’idées, au point de vue spécial des opérations, un intérêt capital. Comme le dit le lieutenant-colonel, le mémoire qu’il prépara et rédigea à Bologne le 12 février fut remis par lui au feld-maréchal comte de Bellegarde à Villafranca le 15 février (15). Son authenticité est d’autant plus grande que ce mémoire, véritable exposé des vues et des intentions de lord William Bentinck se retrouve textuellement, mot pour mot, et également rédigé en français au K. und K. Kriegs-Archiv (16) mais avec cette seule différence que, daté également de Bologne le 12 février, ce projet d’opérations est adressé cette fois au feld-maréchal autrichien par le feld-maréchal-lieutenant comte de Neipperg. On pourrait donc être tenté de vouloir chercher à établir à l’aide de preuves ou d’arguments, quel a été le véritable auteur de ce mémoire. Il nous semble toutefois sans vouloir insister outre mesure sur ce point de détail, que, selon toutes les probabilités, en raison des faits exposés dans ce rapport, et surtout si l’on considère la conversation qu’il eut avec Neipperg le 13 février au matin avant de quitter Vérone pour se rendre à Villafranca, Catinelli a dû réellement rédiger la pièce qu’il a remise à Bellegarde. De plus il suffit de connaître quelque peu le caractère violent et entier, l’obstination et la méfiance de Bentinck pour penser que, à la suite des longues et nombreuses discussions qu’il venait d’avoir avec Neipperg, il n’aurait jamais songé à lui confier le soin de rédiger seul et de présenter à Bellegarde le texte mème d’un pian d’opérations qui, dans son esprit, avait bien moins pour objet de déterminer le rayon d’action des forces britanniques que de régler la nature des relations qu’il comptait, lui, Bentinck, entretenir avec le roi de Naples pour lequel, il trouvait Neipperg disposé à trop de condescendances et d’égards. L’existence aux Archives impériales et royales de la Guerre de ce mémoire signé par Neipperg n’est, par suite, à nos yeux et à notre avis, que la preuve évidente de l’entente qui s’était établie entre le général autrichien et l’officier supérieur, dépositaire de la confiance et des secrètes pensées du lord capitaine général. Elle nous prouve que, à partir de ce moment, Bentinck est bien près d’en arriver à ses fins et de devenir, comme il l’avait toujours voulu et recherché, le maître de la situation, l’arbitre de la destinée de l’infortuné roi de Naples dont il s’était promis de préparer et de consommer la perte.

Toutefois, comme surtout dans cet ordre d’idées, il importe tout particulièrement de chercher à remonter jusqu’aux origines mèmes des choses, pour peu que l’on veuille bien s’en rapporter au projet de coopération d'un corps d’armée sous les ordres de Son Éminence lord William Bentinck, commandant en chef les forces britanniques dans la Méditerranée avec les troupes autrichiennes et napolitaines réunies pour la campagne en Italie, présenté par Neipperg à Naples, le 2 février, approuvé par Bentinck et transmis par lui avec avis favorable le 6 février de Naples à lord Bathurst, on devra reconnaître que l’idée première de ce pian d’opération appartient, selon toutes les probabilités, à Neipperg et que ce général a par conséquent jusqu’à un certain point le droit de tenir à attacher son nom au projet définitif que son compagnon de voyage allait soumettre au feld-maréchal (17) .

Lord William Bentinck quittera Palerme le 20, lit-on dans ce Mémoire présenté par Catinelli à Bellegarde (18). Le transport de ses troupes se fera en deux fois. Il partira d’abord avec 7.000 hommes qu’il débarquera probablement près de Livourne et il enverra aussitôt un nombre suffisant de transports pour prendre encore 3 ou 4.000 hommes qui porteront son corps entre 10 et 11.000 hommes avec quelques centaines de chevaux, quelques batteries de campagne et un petit train de siège.

«Il n’y a pour ce corps, dans tous les cas, que deux points de débarquement: la rade de Livourne et le golfe de la Spezia.

«La saison est extrêmement désavantageuse pour une expédition et la côte sur laquelle on devrait débarquer est la plus exposée et la plus mauvaise de la Méditerranée.

«Lord William Bentinck a entièrement consenti à une coopération dans le sens qui lui a été communiqué par le lieutenant-général comte de Neipperg. Il préfère débarquer près de Livourne, plutôt que dans le golfe de la Spezia, uniquement parce que la rade de Livourne permet le mouillage hors de la portée du canon, ce qui n’est pas le cas pour le golfe de la Spezia. Mais l’ennemi s’est préparé à empêcher un débarquement près de Livourne, et il faut, vu la qualité -de la côte, bien peu de chose pour y réussir.

«Cette circonstance mérite, de la part de lord William Bentinck la plus grande considération. On ne peut pas avec une expédition et dans une telle saison et sur une telle côte, faire des navettes. On ne peut pas surveiller quelque part et débarquer ailleurs. Il faudra, par conséquent, y forcer le débarquement, mais ni les vaisseaux de ligne, ni les frégates et pas même les corvettes ne peuvent assez s'approcher de la côte pour protéger le débarquement, et ainsi le problème sera toujours très difficile à résoudre.

«Dès que lord William Bentinck aura débarqué,il attirera à lui les troupes britanniques actuellement sous les ordres du général comte de Nugent. Non seulement le chevalier Graham (19) mais aussi le lieutenant-général comte de Neipperg a fait espérer à lord William Bentinck que Son Excellence le maréchal comte de Bellegarde voudra lui fournir de la cavalerie, de l’infanterie légère et quelques officiers du génie avec des sapeurs et des mineurs.

«Si les troupes destinées à soutenir le corps britannique de lord William Bentinck, dès qu’il aura débarqué, marchaient d’avance à Pise et Livourne pour y nettoyer la côte, l’ennemi serait obligé à se borner à la ville de Livourne et à s’y renfermer. Dès lors, un débarquement près de Livourne ne rencontrerait aucune difficulté et se ferait dès que le vent le permettrait.

«D’après les ordres de son gouvernement lord William Bentinck devrait, de préférence, débarquer au golfe de la Spezia; mais pour cela il serait nécessaire que les Autrichiens lui prêtassent la main et qu’ils obligeassent l’ennemi à quitter les batteries élevées le long de la côte et à se borner aux forts qui n’empêcheraient cependant pas le mouillage de l’escadre et de ses transports dans le golfe.

«Il serait certainement à désirer que les troupes britanniques débarquassent au golfe de la Spezia plutôt que près de Livourne. Dès leur apparition dans le golfe, elles affecteraient puissamment les opérations du vice-roi.

«Les troupes qu’amènera lord William Bentinck sont de vieilles bandes d’une composition, d’une discipline et d’une tenue qui ne laissent rien à désirer. Dès qu’elles seront débarquées, elles seront aidées par toute la marine anglaise de la Méditerranée et seront probablement bientôt renforcées par une brigade italienne que l’on attend de Catalogne.

«La coopération de toutes ces forces est sans doute un objet de la plus grande importance et peut-être vaudrait-il la peine que l’armée autrichienne fit quelques effort pour accélérer le débarquement de ces troupes et pour amener la possibilité qu’il se fit à la Spezia plutôt qu’à Livourne.

«Si l’armée autrichienne suivait l’ancienne ligne d’opérations, telle qu’elle a été adoptée par le prince Eugène et les généraux autrichiens qui commandaient en Italie pendant la guerre de la Succession d’Espagne, et, par conséquent, si elle passait en force le Pò, le vice-roi n’aurait plus un moment à perdre pour se replier sur la ligne Gènes-Gavi-Alexandrie. Dans ce cas, le général comte de Nugent pourrait, dès lors, marcher par sa gauche de Parme par Pontremoli à la Spezia. Le roi de Naples serait avec ses Napolitains entre Nugent et l’armée autrichienne et dès lors la campagne pourrait prendre une allure décidée.

«Au bout de peu de jours, le corps du général comte de Nugent serait remplacé par celui de lord William Bentinck et deviendrait entièrement disponible.

«Quel que soit le pian d'opération que l'on suive, il est également de l’intérêt du roi de Naples et de lord William Bentinck de ne jamais se trouver en contact immédiat. Le premier risquerait qu’un beau jour la moitié de son armée passât au camp anglais et l’autre se trouverait à tout instant dans des situations embarrassantes. Si le corps du général comte de Nugent formait, selon les circonstances, tantôt l’aile gauche de l’armée napolitaine, tantôt la droite du corps britannique, tout risque de cette espèce serait éloigné. D’après le projet de coopération du lieutenant-général comte de Neipperg, lord William Bentinck aura pour base de ses opérations la Toscane et pour ligne d’opérations la rivière de Génes, et le corps britannique, qui occupera ces deux pays exclusivement, sera séparé de l’armée napolitaine par la chaîne des Apennins, cette dernière ayant sa ligne d’opérations entre ces montagnes et la rive droite du Pò.»

En attendant le roi de Naples adresse aux peuples des départements méridionaux de l’Italie les paroles suivantes:

«Un Trattato di pace conchiuso con S. M. I. R. l’Imperatore d'Austria e con le Potenze Alleate Continentali mette S. M. Il Re delle due Sicilie nel possesso provvisorio degli Stati Romani, della Toscana e dei departementi Italici Meridionali. Un armistizio stipulato con l’Inghilterra, che sera tosto seguito della Pace, aggiunge a questo primo bene la libertà dei mari e le divizie del commercio ((20))».

«Lord William Bentinck serait certainement bien fâché de faire la guerre dans un pays administré à la française, ou, ce qui revient au même, à la napolitaine. Si, effectivement, le traité de l’Autriche avec le présent roi de Naples met celui-ci en possession provisoire de la Toscane, il sera nécessaire que Son Excellence le maréchal comte de Bellegarde indique à lord William Bentinck une autre base et une autre ligne d’opération.

Avant de pousser plus loin et de passer en revue les quelques (1) documents qui complètent la mission de Catinelli, il convient de remarquer que, si la minute remise à Bellegarde n’est, en réalité, dans son ensemble, que la paraphrase du projet de coopération établi par Neipperg, elle contient cependant une dernière partie, à la fois politique et militaire, d’autant plus intéressante et importante qu’elle seule nous révélera le fond de la pensée de lord William Bentinck, et les conditions mêmes que le singulier diplomate qui commandait en chef les forces britanniques dans la Méditerranée mettait à l’entrée en ligne de son corps d’armée.

Comme il est d’ailleurs aisé de le constater, Bentinck et Catinelli se sont manifestement inspirés des aperçus que contenait le projet en question. Le lord capitaine général s’est naturellement empressé d’accepter l’offre qui lui était faite d’occuper exclusivement la Toscane et la rivière de Gènes et la proposition d’opérer sur un théâtre spécial séparé de l’armée napolitaine par la chaîne des Apennins. Pareille combinaison répondait si complètement aux désirs et aux visées politiques du lord capitaine général qu’il crut nécessaire d’insister tout particulièrement sur ce point, de façon à bien démontrer à Bellegarde qu’il faisait de la question de l’occupation exclusive de la Toscane une condition sine qua non, qu’il était de l’intérêt du feld-maréchal et de la coalition de faire accepter, bon gré, mal gré, au roi de Naples. Aussi, et il suffit pour cela de relire le rapport même de Catinelli à Bentinck, quoi qu’en dise le comte de Mier dans la dépêche qu’il adressa, le 14 mars, au prince de Metternich, jamais Murat ne tint, lors de l’audience qu’il accorda à Bologne au lieutenant-colonel, les propos que le ministre d’Autriche lui prêta et communiqua au chancelier: «Après une longue discussion à ce sujet, écrira-t-il dans sa dépêche du 14 mars, Sa Majesté dit à Catinelli: «Que lord Bentinck arrive seulement avec ses troupes à Livourne et vous verrez que nous nous arrangerons déjà pour le reste ((21))».

Le diplomate autrichien avait pris ses désirs pour des réalités. Il avait peut-être écouté d’une oreille quelque peu distraite le long entretien que Murat eut avec Catinelli et, de plus, il ne connaissait guère le caractère de Bentinck. Un mois après, lors de la conférence de Bologne, lorsqu’il se retrouva avec le général anglais à Reggio, Mier fut lui-même obligé de reconnaître qu’il avait été trop vite en besogne, et de constater que lord Bentinck ne voulait «pas se départir de son idée et prétention de prendre possession de tonte la Toscane (22)». Force lui fut également d’informer son gouvernement que le roi de Naples, irrité de la dureté et des menaces de lord Bentinck, qui se refusait même à accepter l’arbitrage de lord Castlereagh, avait déclaré «qu’il aimerait mieux perdre sa couronne que se conformer aux déclarations arbitraires de lord Bentinck». Le pauvre ministre d’Autriche avait vainement employé tous les raisonnements possibles auprès du général anglais pour l’engager à se désister de ses prétentions. Lord Bentinck lui avait répondu que tout lui était égal, qu’il ne céderait en rien à Joachim, que son honneur et la dignité de sa nation y étaient intéressés. «Les choses en sont là, écrivait-il tristement a Metternich ((23)), et je crains, connaissant le caractère des personnages, les suites les plus fâcheuses de cette mésintelligence».

Mais, sans anticiper davantage sur des événements que nous aurons lieu d’étudier en détail, il suffit de considérer quelque peu attentivement les dernières lignes de la Minute de Catinelli pour voir qu’elles contenaient les germes de cette mésintelligence prévue, provoquée et désirée par lord William Bentinck. Rien ne prouve mieux, en effet que telles étaient bien les véritables intentions du lord capitaine général que le fait, qu’il avait eu le soin de confier à Catinelli une autre mission confidentielle, dont le lieutenant-colonel devait s’acquitter avant de le rejoindre a Naples et que celui-ci relate dans une note spéciale jointe au rapport d’ensemble dont font partie les deux pièces précédemment citées (24).

«J’ai vu, à Bologne, écrit le lieutenant-colonel Catinelli, la plus grande partie de l’armée napolitaine. Elle n’a pas mauvaise mine; mais, à quelques corps près, on voit que c’est une nouvelle levée. On était à Bologne très mécontent des Napolitains. On les trouvait, sans comparaison, plus insolents que les Français. On m’a raconté, en plusieurs endroits, que les soldats napolitains disent tout haut qu’ils ne se battront pas et qu’on leur a fait quitter le royaume de Naples, non pas pour se battre, mais uniquement pour occuper les États du pape et de la Toscane.

«Le roi, de son côte, a trop d’expérience et est trop bon général pour avoir beaucoup de confiance dans sa troupe et cela déjà l’arrêterait, même s’il avait la plus grande envie de se battre. Il devrait nécessairement craindre de se nuire par des échecs qui, en dévoilant la faiblesse et la nullité de ses troupes aux Francis aussi bien qu’aux alliés, apprendraient aux uns et aux autres à faire peu de cas de lui et à le traiter en conséquence.

«Le roi est bien attaché à la France et n’est pas sans reconnaissance envers Bonaparte. Ce n’est certainement pas par inclination qu'il a traité avec les alliés. Il m’a parlé avec émotion des reproches que lui ferait la France, et je l’ai vu frémir à cette idée. Il craint beaucoup les Anglais et paraît persuadé qu’il aurait perdu son royaume s’il n’avait pas fait la paix avec l’Autriche. Il paraît aussi persuadé qu’il n’y a pas de salut à espérer pour Bonaparte, qu’il est perdu et que personne au monde ne saurait le sauver. Ainsi, pense-t-il, j’aurais perdu mon royaume et je n’aurais sauvé ni la France, ni Bonaparte.»

«L’alliance du roi de Naples sera certainement de peu de ressources aux alliés, tandis que l’Italie, si on avait voulu y naturaliser la guerre, en aurait offert d’immenses. La conduite que tiendra le roi de Naples est encore un mystère, tandis qu’une guerre nationale italienne aurait depuis longtemps réduit l’armée du vice-roi aux seuls Français et porté les Austro-Italiens au-delà des Alpes, en Savoie et en Dauphiné.

«Si les Alliés sont malheureux en France, ce qui est assez à craindre, le roi de Naples tombera probablement sur les Autrichiens et tâchera, par quelques coups du plus grand éclat, de se faire un grand mérite au près de Bonaparte et de la nation française.

«La conduite des Alliés envers l’Italie est un péché qui, comme le partage de la Pologne, coûtera bien cher à l’Europe. Il faudra encore une vingtaine d’années de l’expiation.

«Les affaires d’Italie sont aussi mal acheminées que possible. La campagne y est gâtée, et toute la chose mal conçue, mal jugée et mal menée.

«La conduite envers le roi de Naples n’est pas moins blâmable. On fait, défait, refait des traités avec lui. Les Autrichiens font la paix avec lui et signent une alliance. Les Anglais signent à contre-coeur et de très mauvaise grâce un armistice. Ou il fallait faire la guerre au roi de Naples, ou il fallait le gagner entièrement et en faire un confrère dans la grande alliance pour le rétablissement de l’ordre et de la paix en Europe.

«Je pense que l’Angleterre pourrait encore décider le roi de Naples à rompre en visière avec Bonaparte et à décider la campagne d’Italie. Elle pourrait lui dire: «C’est à regret, à contre cœur que nous traitons avec vous; mais les intérêts de l’Europe, les intérêts généraux, nous décident à vous tendre la main. Méritez bien de la cause commune. Donnez à la campagne d’Italie l’impulsion qu’il lui faut. Agissez, et l’Angleterre vous reconnaîtra, vous garantira votre royaume, vous protégera si on vous attaque ou si on se refuse à tenir les engagements pris avec vous.» Ce langage déciderait le roi, tandis que celui que lui tient l’Angleterre, ne laisse pas de lui faire craindre pour son existence. Il ne sait effectivement que faire, craint d’être la dupe des alliés, et, en devenant un objet d’horreur aux Français, de devenir un objet de ridicule aux alliés. Le roi de Naples a une très haute idée de la franchise de lord William Bentinck et je suis sur que le seul moyen de lui faire passer le Rubicon, chose désormais indispensable et sans laquelle on risque encore de tout perdre, c’est un rapprochement de la part de lord William.

«La Toscane offre un moyen qui ne pourrait pas être plus à propos. L’occupation de la Toscane par les Anglais ne manquerait pas d’absorber une partie de leurs forces, et cela sans nécessité. Lord William Bentinck pourrait reconnaître les titres du roi de Naples sur la Toscane comme premier occupant. Le roi ne s’y attend d’aucune manière et serait surpris d’un pareil procédé qu’il jugerait grand et généreux. On pourrait avoir en même temps l’air de goûter les ouvertures qu’il m’a faites et d’être prêt à y prêter la main, dès qu’il aurait donné des preuves de son empressement pour la cause des alliés et dès qu’il aurait rompu en visière avec Bonaparte.

«J’ai oublié de dire que le feld-maréchal comte de Bellegarde avait, après la bataille du Mincio, renoncé à toute idée offensive et qu’il allait, pour faire semblant d'avoir eu le dessus, assiéger Legnago. Ce siège cependant l’occupera de manière à rendre disponibles toutes les forces du vice-roi, ce qui paralysera également Nugent et l’armée napolitaine. L’arrivée en Italie de lord William Bentinck remontera l’esprit du maréchal.»

Sans parler même des curieuses révélations contenues dans ce document absolument ignoré jusqu’à ce jour, cette dernière pièce présente, à notre avis du moins, un intérêt tout particulier en raison même du grade relativement peu élevé de son signataire et du caractère bien connu de lord William Bentinck. Il nous semble évident, en effet, que cette pièce permet de se faire une idée de la personnalité de l’homme qui ne craignait pas de tenir un pareil langage à un chef aussi entier que Bentinck. Il est, en tout cas, remarquable de voir précisément l’homme qui connaissait mieux que personne les pensées intimes du lord capitaine général, sa violence et son obstination, l’officier qu’il avait investi d’une pareille mission de confiance, celui-là même qui venait de le représenter aux quartiers-généraux de Bellegarde et de Murat, le rédacteur de la minute, ne pas hésiter, au risque d’encourir la disgrâce de son terrible et tout-puissant patron, à lui dire franchement et ouvertement ce qu’il pense, lui communiquer sans détours, sans périphrases, les impressions qu’il rapporte dé sa mission, conclure sans crainte dans un sens diamétralement opposé à celui désiré par Bentinck, lui conseiller en un mot de renoncer à ses prétentions sur la Toscane, et insister sur la nécessité d’un rapprochement avec le roi de Naples, rapprochement dont la Toscane sera le prix. L’homme qui, dans un pareil moment, osait tenir un pareil langage à un tei chef, n’était assurément pas un courtisan.

Après avoir rendu à Catinelli la justice que nous semblait mériter tant de franchise jointe à un véritable sens politique, il ne nous reste plus qu’à reproduire dans l’ordre chronologique les trois dernières pièces qui ont trait à sa mission: la réponse de Bellegarde à lord William Bentinck, la lettre du feld-maréchal autrichien à l’empereur François et enfin la dépêche que lord William Bentinck, en possession des différentes lettres de Catinelli, adressait au comte Bathurst avant de quitter Palerme.

«My lord (25), écrivait Bellegarde à lord William Bentinck de Villafranca le 15 février 1814, quelques instants après la fin de la conférence, le lieutenant-colonel Catinelli m’a remis la lettre que Votre Excellence m’a fait l’honneur de m’écrire en date du 5 de ce mois.

«Le projet d’opération qui a été présenté à Votre Excellence par le comte de Neipperg est entièrement conforme à mes idées sur la campagne. Je le regarde comme celui qui peut le mieux convenir en particulier à Votre Excellence, comme lui donnant des occasions plus promptes et plus directes de mettre les forces à ses ordres en activité et de concourir d’une manière plus décisive au succès général de nos opérations.

«Dès que Votre Excellence aura effectué son débarquement à Livourne, qui est le point qu’Elle a choisi de préférence, je suis très disposé à lui envoyer un détachement de cavalerie. Je ne pourrais cependant pas le faire monter à plus de 4 à 500 chevaux, la force de ma cavalerie suffisant à peine à remplir les objets si multiples auxquels doit atteindre mon armée. Je ne puis pas non plus l’envoyer en Toscane avant que les troupes britanniques y aient débarqué; car il pourrait s’y trouver compromis, les Français ayant encore en Toscane quelques milliers d’hommes; mais je ferai d’avance les dispositions nécessaires pour qu’il y joigne sur-le-champ Votre Excellence. Autant que cela me sera possible pour le grand nombre de places que je dois observer et bloquer, je serai de même empressé de lui fournir quelques officiers du génie, des sapeurs et des mineurs.

«Puisqu’il y a dans cette saison de grandes difficultés à un débarquement dans la rivière de Gènes, ce qui fait préférer à Votre Excellence le point de Livourne, Elle sentirà l’avantage qu’il y aurait si Elle pouvait au moins se porter rapidement vers Gènes. C’est le point sur lequel ses forces seraient d’un plus grand effet.

«D’après les quelques observations que m’a remises le lieutenant-colonel Catinelli sur le projet de notre campagne, il m’a parti que Votre Excellence inclinait à croire qu’il me serait possible de seconder le débarquement des troupes de Votre Excellence, auquel la saison apporte quelques obstacles, parie détachement d’un corps assez nombreux pour nettoyer la côte et que le moyen d'atteindre ce résultat serait d’opérer avec mon armée sur la rive droite du Pò, prenant ainsi la ligne d’opérations suivie par le prince Eugène et les armées autrichiennes pendant la guerre de la Succession d’Espagne. Mais j’observerai qu’alors aucune des places du Vénitien n’était au pouvoir des Français. Ce mouvement, loin de forcer aujourd’hui le vice-roi à la retraite sur Alexandrie et sur Gènes, le mettrait à même de faire lever le blocus de toutes ces places et, en se réussissant à leurs garnisons, d’occuper sur nos Communications l’Adige avec une force supérieure a la mienne.

«Les mêmes observations manifestent aussi l’inquiétude de voir le roi de Naples occuper la Toscane. Ce ne serait en tout cas qu’une mesure extrêmement provisoire puisque, dès que la Toscane sera évacuée par l’ennemi, il est convenu qu’elle sera remise à son ancien maître. Son Altesse Imperiale le grand-duc de Toscane. Mais aucun acte n’a encore autorisé Sa Majesté le roi de Naples à cette occupation provisoire.

«Je joins à Votre Excellence copie de la convention militaire (26) conclue pour déterminer une ligne entre mon armée et l’armée napolitaine. Votre Excellence verrà que cette ligne s’arrête au sommet des Apennins et ne touche, par conséquent, en rien à la question de la Toscane.

«Il est vrai que le roi de Naples trouve cette ligne incomplète et a exprimé le désir que, par un article additionnel, elle fùt prolongée jusqu’à la mer en suivant les confins de la Toscane et de la principauté de Lucques. C’est un objet que j’ai remis à la médiation de M. le comte de Mier en lui faisant les observations qui rentrent sous ce rapport dans les vues de Votre Excellence.

«Je dois terminer par faire remarquer à Votre Excellence, combien la coopération de ses troupes sera décisive pour le sort de nos armes en Italie et combien il serait intéressant que rien ne mit obstacle à l’activité du roi de Naples.

«Après les détachements que je dois faire pour les blocus d’Osoppo, Palmanova, Venise et Legnago, pour les observations de Mantoue et de Peschiera, il ne me reste qu’une force égale à celle du vice-roi. La position de ce dernier sur le Mincio est si solidement établie par ces deux places que mes forces ne suffisent pas pour l’en déloger par une attaque de front. Ce n’est qu’un effort combiné du corps du général comte de Nugent, soutenu parles Napolitains, qui peut nous mettre en avantage, et je sollicite Votre Excellence de favoriser cette coopération, autant que cela lui sera possible. De mon côte, il me sera très agréable de seconder ses opérations par les moyens que je pourrai mettre à sa disposition.

«Je La prie d'agréer l’assurance de ma haute considération.»

Il serait assurément tentant et instructif d’analyser presque ligne par ligne cette dépêche, dans laquelle le feld-maréchal expose, en somme, avec une assez grande franchise, à peine dissimulée sous quelques formes diplomatiques, au général anglais qu’il a hâte de voir débarquer à Livourne ou à la Spezia, la véritable situation de son armée. Mais, outre que pareille analyse nous entraînerait à de trop longs développements, elle aurait,d’autre part, l’inconvénient d’être jusqu’à un certain point superflue. Cette dépêche contient, en effet, un aveu qui rend tout commentaire inutile, un aveu qui, échappé au feld-maréchal lui-même, tranche à tout jamais les controverses auxquelles a donné lieu la question de savoir lequel des deux adversaires avait réellement le droit de s’attribuer l’avantage à la suite des résultats quelque peu confus de la bataille du Mincio. Il nous semble que, si le vice-roi n’a assurément pas réussi aussi complètement qu’il l’aurait désiré, si l’insuccès de sa gauche l’a empêché, comme il l'avait peut-être espéré, de rentrer à Vérone et de reprendre la ligne de l’Adige, Bellegarde, de son côte, est obligé d’avouer à lord William Bentinck, huit jours après la bataille, qu'il n’a pu entaîner la position de son adversaire, que le vice-roi est si solidement établi sur cette ligne même du Mincio, qu’il a vainement cherché à forcer, que ses troupes ne suffisent pas pour l’en déloger par une attaque de front, et qu ii ne peut espérer l’amener à l’abandonner que grâce à un mouvement de Nugent et des Napolitains sur la rive droite du Po. C’est là, il nous semble, une constatation qu’au milieu des tristesses de cette année néfaste, il est consolant de pouvoir enregistrer, un fait d’autant plus caractéristique qu’il nous est révélé par le général même qui vient de livrer au vice-roi la bataille, pour le moins indécise, du Mincio.

Le rapport que, vingt-quatre heures après avoir répondu à lord William Bentinck, Bellegarde adresse à son souverain au sujet même des négociations en cours avec le général anglais, va d’ailleurs mettre en pleine lumière certains coins du tableau quelque peu restés dans l’ombre jusqu ici.

«Lorsque le général comte de Neipperg, écrit-il (27), parla à Naples à lord William Bentinck de l’intérêt qui y aurait à la conclusion d’un armistice entre les Anglais et le. roi de Naples, il lui fit également part de l’avantage qui y aurait à voir les troupes britanniques participer à nos opérations.

«Neipperg, que j’avais mis au courant de mes projets, proposa un pian d’opération qui reçut l’approbation de lord William Bentinck ((28)).

«Depuis lors, et afin de s’entendre plus complètement avec moi, lord William Bentinck m’a envoyé le lieutenant-colonel Catinelli, attaché à son état-major, qui m’a fait, au nom de lord William, des observations relatives à ce pian d’opération.

«Votre Majesté verra par ma réponse (29) pourquoi j’ai fait cette proposition à lord William Bentinck et pourquoi je lui ai promis de le faire soutenir par quelque cavalerie et enfin pourquoi j’ai tenu à ce qu'aucune considération ne pût servir de prétexte au roi de Naples pour justifier un arrêt dans ses opérations.

«Lord William Bentinck ne veut pas être mis en contact avec les Napolitains. C’est là un état de choses peu favorable pour nos opérations.

«J’ai écrit au comte de Mier, qui sait que le roi de Naples tient à occuper la Toscane, afin qu’il l’amène à consentir à laisser la Toscane et la rivière de Génes comme base d’opérations aux Anglais.

«Le feld-maréchal-lieutenant comte de Neipperg est arrivé ici, hier 15 février, avec le traité signé. Je vais de suite le pourvoir d’un commandement. Neipperg m’affirme que Murat a montré beaucoup de bonne volonté. Le roi lui a toutefois déclaré qu'il ne commencerait les opérations qu’après avoir reçu une lettre autographe de Votre Majesté ou la ratification du traité.

«Je prie Votre Majesté de rassurer le roi de Naples le plus tòt possible afin qu’on puisse procéder à l’exécution du pian projeté d’opérations.»

L’entente entre les alliés était loin d’être parfaite on le voit; et s’il avait eu connaissance de la dépêche que lord William Bentinck adressa au comte Bathurst, aussitôt après avoir, re$u à Palerme les rapports précédents du lieutenant-colonel Catinelli ainsi que la réponse même du feld-maréchal, Bellegarde n’en aurait cu que plus de motifs pour déclarer à son. souverain que c’était là un état de choses peu favorable aux opérations, et Murat, pour regretter, comme il le faisait déjà du reste, son entrée dans la coalition.

«Le premier échelon est embarqué, écrit-il ((30)). Je pars ce soir sur la Furieuse pour Naples. J’y prendrai Catinelli et j’irai droit à Livourne.

«Murat a proposé de nous voir débarquer dans le golfe de la Spezia. Il ne Fa fait que pour nous éloigner de la Toscane. Mais j’ai pour le moment l’intention d’aller droit à Livourne, dont je compte réclamer la possession exclusive. Avec un allié dont la conduite paraît équivoque, il y a lieu de se garder à l’extrême et j’aurai avant tout le soin d’assurer à mes troupes et à mes transports une place qui leur servira de base et d’appui.

«Je crois que l’autorité de Murat sur son armée comme sur son royaume est si fragile, qu’il redoute tellement une rupture avec nous, que je me crois sur d’arriver facilement à le faire souscrire à tout arrangement qui sera à notre convenance à nous.»

Rien, on le voit donc, n'avait pu, depuis l'ouverture des négociations, parvenir à modifier les idées et les vues de Bentinck. Entier, cassant, opiniâtre, et continuant jusqu’au bout à ne tenir aucun compte des instructions mêmes de son Gouvernement, il était toujours l’homme qui n’acceptait ni conseils, ni leçons, l’homme qui, quelques semaines plus tard et bien qu’on lui eût ordonné de signer un traité d’amitié avec Murat, n'hésitera pas à notifier de sa propre autorité un ultimatum au roi de Naples, à le sommer d’évacuer la Toscane et de la remettre aux Anglais.

Grâce à ces rapports du lieutenant-colonel Catinelli, si curieux et si bourrés de faits, à ces rapports que, malgré leur longueur, nous avons cru nécessaire de reproduire textuellement, grâce aussi aux autres documents qu’il nous a semblé indispensable de leur adjoindre pour les compléter, il sera désormais aisé de se représenter ce-qu’ont été les relations de Service entre Murat, Bellegarde et Bentinck, les tiraillements perpétuels et de toutes sortes qui se sont produits à tout instant et qui n’ont fait que s’envenimer de plus en plus.

La lumière que ces pièces jettent sur les dessous mêmes de la situation permettra de plus de remonter jusqu’aux causes mêmes de l’inaction forcée de l’armée autrichienne immobilisée sur la rive gauche du Pò, et de s’expliquer comment, malgré tout son tact, son habileté et sa diplomatie, Bellegarde s’est vu dans l’impossibilité d’imposer ses volontés et d’assurer l’unité du commandement, élément essentiel, condition fondamentale de la réussite des opérations militaires.

Par une singulière coïncidence, le jour même où Catinelli discutait avec Murat à Bologne les conditions que son intraitable chef était décidé à lui imposer, le colonel Tascher de la Pagerie, parti du quartier-général de Volta, le 9 février, de Milan, le 10, et arrivé le 16 au matin à Paris, rejoignait le quartier-général impérial à Guignes et était immédiatement introduit auprès de l’empereur. Interrogé par Napoléon anxieux d’avoir des nouvelles de son armée d’Italie, Tascher lui rendit compte de la bataille du Mincio et lui remit les dépêches du vice-roi. L’empereur fut content du récit de Tascher et lui «commanda de lui faire connaître des détails que le prince n’avait pas eu le temps de lui donner sur les circonstances et la portée des succès obtenus par l’armée d’Italie, sur la position du prince et l’esprit des troupes italiennes (31).

L’empereur, écrit encore Tascher, parut.fort satisfait, me demanda un rapport écrit de tout ce que je venais de lui dire et m’ordonna d’aller me reposer et de ne pas quitter le quartier-général.

«Demain ou après, ajouta l’empereur, en le congédiant, nous aurons une belle affaire et tu verras que les soldats de la Grande Armée se battent aussi bien que ceux d’Italie (32)

Deux jours plus tard, le lendemain du brillant combat de Monnant, l’empereur, après avoir renouvelé à Tascher ses questions sur les opérations de l’armée d’Italie, devait, comme nous le verrons, lui prescrire de rejoindre au plus vite le vice-roi et de lui apporter l’ordre, formel cette fois, de garder l’Italie le plus longtemps qu'il pourra et de s'y défendre.

Le soir de ce même jour, à peine rentré à Volta, ignorant naturellement le résultat de l’audience accordée à Tascher, ne sachant pas que l’empereur avait annulé ses ordres antérieurs, ses ordres conditionnels relatifs à l’évacuation de l’Italie, n’ayant pas encore connaissance de la notification de la déclaration de guerre envoyée la veille de Bologne à Volta, par Millet à Vignolle, le vice-roi avait répondu en termes catégoriques à la dépêche que le due de Feltre lui avait expédiée le 9. Il pouvait, en effet, déclarer à ce moment au ministre de la Guerre que, le roi de Naples n’ayant pas encore déclaré la guerre, le cas prévu par l’ordre de l’empereur ne s’était pas présenté, qu'il était d’ailleurs tout prêt à se porter sur les Alpes si l’on jugeait nécessaires en France sa présence et celle de ses troupes, mais que, dans ce cas, il fallait lui en donner l’ordre formel et s’attendre, en raison même de la composition de son armée, à une grande diminution de ses forces (33).

Retardée qu’elle avait été jusqu’à ce moment dans sa marche par l’attitude expectante et douteuse des Napolitains, qui restaient immobiles, tantôt sous le prétexte que les Francis allaient passer le Pò à Borgoforte, tantôt parce qu’il leur fallait prendre certaines mesures avant de commencer leurs opérations, la division Nugent ne fit que peu de chemin pendant la journée du 16.

Malgré le changement radical que la déclaration de Murat ne pouvait manquer d’apporter à l’ensemble de la situation, malgré la hâte qu’il avait de pousser jusqu’à Plaisance, avant que le vice-roi n’ait eu le temps et la possibilité d’y envoyer des renforts, Nugent obligé, par la force même des choses, âne pas s’éloigner davantage des tétés de colonne de l’armée napolitaine, était, en outre, lié par un ordre lui enjoignant de ne rien entreprendre sans la coopération effective des Napolitains.

On considérait, en effet, non sans quelque raison, que le mouvement sur Plaisance pouvait avoir des conséquences dangereuses tant qu’il ne serait pas général, parco que les Français, maîtres des tètes de pont de Borgoforte et de Casalmaggiore, pouvaient sérieusement menacer les derrières et la droite de Nugent, et que leur forte position sur le Mincio leur permettait d’exécuter ce mouvement au moment qui leur conviendrait le mieux, sans que Bellegarde pût s’en apercevoir et s’y opposer. On avait même, au quartier-général de Villafranca, poussé la prudence et la timidité tellement loin qu’on avait invité Nugent à n’entreprendre le détachement sur Pontremoli que lorsque Bentinck aurait débarque ses Anglo-Siciliens en Toscane (34) .

Par suite, l’avant-garde de Nugent avait seule pu gagner un peu de terrain en avant et était arrivée à Fiorenzuola (sur la rive droite de l’Arda (35)), d’où elle s’était fait couvrira gauche par un détachement sur Salso Maggiore (dans l’Apennin au sud de Borgo San Donnino), à droite sur Busseto (au nord-est de Fiorenzuola, à peu de distance de la rive droite de l’Ongina). Une reconnaissance autrichienne, envoyée de Parme sur le Po, avait réussi à traverser la rivière et était entrée à Casalmaggiore, au moment même où une reconnaissance française y pénétrait. Profitant de la confiance imprudente de cette patrouille, qui, venne de Piadena, où se trouvait une brigade de la division

Rouyer, avait négligé de s’éclairer et de se garder, les Autrichiens tombèrent à l’improviste sur les cavaliers français, les bousculèrent, sans leur laisser le temps de se reconnaître, et leur enlevèrent 6 hommes.

Les Napolitain savaient, d'ailleurs, commencé leur mouvement. Depuis la veille, ils avaient mis un poste de 150 hommes à San Benedetto (sur la rive droite du Pò, en aval de Borgoforte). La division du général Carascosa était à Reggio, suivie, à une journée de marche, par celle du général d’Ambrosio, dont l’un des régiments, le 3(e) de.ligne, formait l’avant-garde à Rubbiera et dont deux autres régiments (2(e) et 9(e) de ligne) étaient à Modène. De plus, cédant aux instances de plus en plus pressantes de Nugent, Murat avait consenti à adjoindre à sa division quatre compagnies de voltigeurs et un escadron de hussards qui arrivèrent à Parme pendant la journée du 16(36) .

En Toscane, les troupes napolitaines, loin de ralentir leur mouvement, cherchaient, au contraire, à occuper au plus vite Livourne, Pise et Lucques. Après s’être arrêté la veille à Pistoia, le général Minutolo avait repris sa marche et attaqué le 16 au matin à Pescia (environ à mi-chemin entre Pistoia et Lucques) les avant-postes du général Pouchain, qui, trop faibles pour résister à la colonne napolitaine, avaient été délogés après un engagement de peu de durée et obligés de se replier sur Lucques (37).

Les hostilités ne devaient, du reste, pas tarder à cesser en Toscane où la grande-duchesse, réfugiée à Lucques, ne possédait plus guère que Livourne, Pise et Lucques avec quelques petits forts en mauvais état, faiblement occupés et à peine armés. On avait fini, d’ailleurs, par se convaincre à Paris de l’impossibilité de s’opposer aux progrès des Napolitains, et, pendant que les troupes de Murat s’avançaient vers Pise et Livourne, Fouché, auquel on avait eu une fois de plus le tort de confier une mission importante, quittait Lucques pour essayer de parvenir jusqu’auprès de Murat à Bologne et de négocier avec lui une convention d’évacuation. En attendant les résultats de cette négociation, en raison même de la marche sur Livourne des troupes napolitaines, qui occupaient déjà Pistoia et Pescia, Elisa avait ordonné au prince Felix de quitter Pise le lendemain et de se rendre avec les quelques troupes restées autour de lui à Génes, point vers lequel on avait déjà dirigé, depuis quelques jours, un bataillon du 112° (38).

Sur le Mincio, tout continuai à être absolument calme. Seul, le corps de blocus avait échangé quelques coups de fusil avec les avant-postes du général Zucchi. De ce côte, on continuait à se borner à chercher à connaître la force et la répartition des troupes françaises établies sur la rive droite du Mincio; mais les données qu’on réussissait à se procurer étaient forcément assez vagues. On avait seulement pu constater que le vice-roi continuait à faire travailler à la mise en état de défense de la ligne du Mincio et qu’on avait pousse en avant et renforcé le poste qui gardait la tète de pont de Goito (39). Enfin, comme Neipperg avait pris le matin même le commandement de la division d’avant-garde, on avait cru d’autant plus nécessaire d’établir un nouvel ordre de bataille que le feld-maréchal-lieutenant Pflacher, quittant le commandement de sa division, avait été,en même temps, pourvu d’un emploi au quartier-général (40).

Après avoir chassé les avant-postes autrichiens de Padenghe (5 kilomètres et demi au nord de Desenzano), le vice-roi avait fait suivre au bataillon de chasseurs de la garde royale, à partir de Polpenazze (7 kilomètres de Salo), le chemin qui de Polpenazze rejoint par la montagne, la route de Brescia, et lui avait donne l’ordre d’attaquer Salo par l’ouest, au moment où lui-même commencerait son attaque de front. Le colonel Peraldi, avec le l(er) bataillon de chasseurs et 2 canons, marchait en tète de la colonne conduite par le vice-roi en personne, éclairée par un peloton de dragons et couverte par une flanc-garde qui de Padenghe avait pris à gauche par Bedizzole, Carzago et Villa di Salo.

Le major Masberg avait fait occuper en avant de Salo les hauteurs de Santa Catarina, que le vice-roi fit enlever à la baïonnette sans tirer un seul coup de fusil, mais dont les défenseurs se replièrent sur Salo, dont Masberg avait barricadé les portes.

Malgré la résistance énergique opposée par le gros des troupes de Masberg établies à la porte de Desenzano et renforcées par une réserve de 2 compagnies, le vice-roi, après avoir envoyé 2 compagnies de grenadiers en soutien des chasseurs du colonel Peraldi, avait pénétré à leur tète dans la ville et fait poursuivre pendant plusieurs kilomètres les Autrichiens qui se retirèrent sur Maderno, sous le feu des canons de la flottille du commandant Tempié, dont le tir bien dirigé avait puissamment contribué à faciliter la prise de Salo.

A quatre heures, tout était fini. Les chasseurs s’établissaient sur la route de Maderno, les grenadiers sur celle de Brescia, les vélites et les dragons à la porte de Salo du côte de Desenzano. On avait enlevé aux Autrichiens, qui avaient eu 25 tués et 75 blessés, 84 prisonniers dont 2 officiers.

Sachant que le major Masberg se retranchait a Maderno, le vice-roi, obligé de retourner à Volta, où sa présence était plus nécessaire que sur les bords du lac de Garde, prescrivit au général Lechi de confier au colonel Peraldi le soin d’enlever Maderno le lendemain matin (41).

___________ NOTE _____________

(1)

Les renseignements qui m’avaient été si gracieusement fournis par Son Excellence M. le feldzeugmeister baron de Catinelli, ont été encore complétés, d’abord par Son Excellence le feldzeugmeister L. von Wetzer, alors directeur du K. u. K. Kriegs-Archiv de Vienne, auquel je dois la communication des pièces officielles relatives à la carrière militaire du lieutenant-colonel Catinelli, ensuite par mon savant et aimable ami, le D(p) von Zwiedineck Sudenhorst, Historien bien connu, professeur de l’Université de Graz, grâce auquel j’ai pu prendre connaissance de l’article nécrologique que la Wiener Zeitung, du vendredi 12 novembre 1869, a consacré à la mémoire du colonel Charles, chevalier de Catinelli.

(2)

K. u,K. Kriegs-Archiv, 1801 Stabsbuch, II, fol. 160.— H. K. R. G.l 198/6, 1807. Cf. Wiener Zeitung, 12 novembre 1869; n° 261.

(3)

K.u. K. Kriegs-Archiv, 1810. II. K. R.G. 1. 37/104.

(4)

Le capitaine baron Sardegna, chargé par Bellegarde de mettre lord William Bentinck au courant des événements, et de lui faire connaitre ce qui s’était passé depuis la signature de l’armistice de Schiarino-Rizzino pendant compte un peu plus tard de la prise de Gènes à l’archiduc Ferdinand d’Este, lui annoncait que Catinelli avait pris une part brillante aux opérations de la courte campagne du corps anglo-sicilien (A’. u. K. Kriegs-Archiv, V, 5 1/4; Vérone, 2 mai 1814).

(5)

K. u. K. Kriegs-Archiv (Feld-Acten), 1814, XIII, 94.

(6)

Ce livre du colonel Catinelli, traduit en français par le D(r) Henri Schiel, a été publié en 1859 à Bruxelles, sous le titre de: La Question italienne, Études du comte Charles Catinelli.

(7)

Record Office, War Office, Sicily, V’182. Rapport du lieutenant-colonel Catinelli sur sa mission aux quartiers-généraux autrichien et napolitain au mois de février 1814, joint à la dépêche de lord William Bentinck à lord Bathurst du 27 février (Texte original en français).

Ibidem (Foreign Office), Sicily, V° 97/ Dépêche n° 2.

(8)

L’état de situation de l’armée de Bellegarde du 11 au 20 février 1814 que nous avons reproduit plus haut (A. u. K. Kriegs-Archiv 11, 296), donne en effet les chiffres suivants: 106 bataillons, 619 compagnies, 75 escadrons; effectif total, 85.122 hommes et 8.896 chevaux; aux hôpitaux, 226 officiers et 28.524 hommes.

(9)

Rien ne saurait mettre plus complètement en lumière l’importance du rôle joué par Catinelli et les conséquences mèmes de son entretien avec Bellegarde que les quelques extraits de la dépêche que le feld-maréchal, après avoir conféré avec l’envoyé de Bentinck, adressa à Metternich de Villafranca, le 16 février 1814 (Haus, Hof und Staats-Archiv).

Bellegarde se disposait en effet à envoyer au chancelier la convention militaire signée par Nugent et la lettre dans laquelle le roi de Naples exprimait le désir de voir se prolonger la ligne de démarcation depuis le sommet des Apennins, où elle avait été arrêtée, jusqu’à la mer en suivant les confins de la Toscane et de la principauté de Lucques, lorsque le lieutenant-colonel Catinelli arriva à son quartier-général.

«Il me déclara, écrit Bellegarde, que lord William Bentinck, tout en acceptant les bases principales de notre pian de campagne, ne voulait pas agir de manière à se trouver en contact immédiat avec l’armée napolitaine; que, son armée ne pouvant en cette saison, débarquer sur la côte de Gènes, il fallait lui donner la Toscane pour base, et que la prétention du roi de Naples mettrait un obstacle direct à la coopération des forces anglaises.»

«Je vous avais manifesté, continue Bellegarde, que, pour ne laisser au roi aucun prétexte pour ne pas agir, je trouvais d'autant moins d'inconvénient à laisser aller sa ligne jusqu’à la mer que le sort de la Toscane était déjà décide et que j'ordonnais à Nugent de s'entendre sur cet ojet avec le comte de Mier, que j'autorisais à signer l'article additionnel proposé par le roi. L’arrivée du lieutenant-colonel Catinelli a suspendu l'envoi de celle dépêche: Je donne d'autres instructions à Nugent. Quant à cet article additionnel qui n’est plus admissible, je chargé Mier de traiter cet objet au point de vue politique et d’écarter les prétentions du roi sur la Toscane par la doublé observation que, militairement, le débarquement des Anglais s'y oppose et, politiquement, que la possession de la Toscane est assurée au grand-due de Toscane...»

(10)

Il nous a paro utile et curieux de rapprocher de ce point de l’entretien de Murat et de Catinelli, quelques passages d’une dépêche (P. S. 3 ad n° 11, Haus, Hof und Staats-Archiv) que Mier adressa plus d’un mois plus tard, de Reggio, le 14 mars 1814, au prince de Metternich: «Neipperg, lui dit-il, a informe Votre Altesse de la signature de l’armistice entre l’Angleterre et le roi de Naples, mais je ne sais s’il lui a parlé d’une convention signée à la même époque avec ledit Lord, en vertu de laquelle les troupes anglaises devaient être mises en possession du grand-duché de Toscane. J’étais à Bologne et n’en ai rien su, pas plus que le cabinet napolitain, jusqu’à l’arrivée du lieutenant-colonel Catinelli au quartier-général du roi de Naples.»

(11)

Cf. Haus, Hof und Staats-Archiv. F.-M. comte Bellegarde au prince de Metternich, Villafranca, 16 février 1814.

«D’après ce que me dit Neipperg, le roi en réclamant cette ligne (la ligne de démarcation qu’il voulait voir prolonger jusqu’à la mer) veut protéger la princesse Elisa que sa grossesse avancée empêche de s’éloigner de ses États.»

(12) Voir les Négociations de Ponza.

(13)

Allusion à son départ causé par le retard apporté à la réponse attendue.

(14)

Il y a loin du langage réellement tenu par Murat à Catinelli à celui que lui prête le Wiener-Zeitung dans l’article nécrologique consacré au colonel. D’après ce journal, Murat, cédant aux observations de Catinelli, lui aurait répondu:

«Eh bien! soit, je ferai ce que désire lord Bentinck, mais à la condition que l’Angleterre empêchera l’Italie de retomber sous le joug de l’Autriche. L'Italie n’est pas faite pour être dominée par l’Autriche. Non, non, l’Italie ne doit pas devenir autrichienne. Ce serait une honte pour l’Italie, aussi bien que pour l’Autriche.»

On ne trouve pas davantage trace de la dernière phrase que le Wiener-Zeitung met dans la bouche de Murat. Après s’être répandu en récriminations contre le vice-roi, il aurait congédié Catinelli en lui disant:

«Vous avez, je le sais, la confiance de mylord Bentinck, dites-lui tout ce que Je vous ai dit à son égard, à l’égard de l’Angleterre, de l’Italie et de l’Autriche, et que je veux être l’ami de l’Angleterre, et cela à tout prix.»

(15)

Record Office, War Office, Sicily, V” 182. Rapport joint à la dépêche de lord William Bentinck à lord Bathurst; Palerme, 27 février 1814 {Ibidem).

(16)

Cf. K. und K. Kriegs-Archiv (Feld-Acten Bellegarde). Le feld-maréchal-lieutenant comte Neipperg au feld-maréchal comte Bellegarde; Bologne, 12 février 1814, II, 1441/2 a (Pian d’opération, texte originai en français).

(17)

Le 6 février, Bentinck avait envoyé de Naples au comte Bathurst le projet de coopération qui venait de lui être remis par Neipperg, en déclarant que «le rôle assigné à l’expédition anglaise lui paraissant rationnel à tous égards, il était pour sa part disposé à l’approuver» (Record Office, War Office,V° 182. Dépêche 3, Naples, 6 février 1814; lord William Bentinck à Earl Bathurst). — A cette dépêche était joint le projet de coopération élaboré par Bentinck qui déterminait à grands traits le rôle ultérieur des trois armées, autrichienne, napolitaine et anglaise»

(18)

Record Office, War Office, Sicily, N° 182. Mémoire présenté parie lieutenant-colonel Catinelli au maréchal comte Bellegarde, le 15 février, préparé à Bologne le 12 février 1814 (originai en français). Cf. K. und K. Kriegs-Archiv (Feld-Acten Bellegarde): feld-maréchal-lieutenant comte Neipperg au feld-maréchal comte Bellegarde; Bologne, 12 février (pian d'opérations rédigé en français, II, 144 1/2 a).

(19)

Sir Thomas Graham, agent politique de la Grande-Bretagne, envoyé à Naples avec le général sir Robert Thomas Wilson.

(20) «Un traité de paix conclu avec Sa Majesté Impériale et Royale l’empereur d’Autriche et avec les Puissances continentales alliées met Sa Majesté le roi des Deux-Siciles en possession provisoire des États-Romains, de la Toscane et les départements du Sud de l’Italie. Un armistice stipulé avec l'Angleterre et qui sera bientôt suivi de la paix ajoute à ce premier bienfait la liberté maritime et la prospérité commerciale.

(21)

GL P. S. 3 à la dépêche du 14 mars 1814. Le comte de Mier au prince de Metternich. Haus, Hof und Staats-Archiv. (Citée par Helfert, p. 567, Kö nigin Karolina von Neapel und Sicilien im Kampfe gegen die französische Weltherrschaft.)

(22)

Cf. P. S. ad n° 12. Le comte de Mier au prince de Metternich; Reggio, 20 mars 1814 (Haus, Hof und Staats-Archivi.

(23)

Cf. P. S. ad n° 12. Le comte de Mier au prince de Metternich; Reggio, 20 mars 1814 (Haus, Hof und Staats-Archivi.

(24)

Record Office, War Office, Sicily, V” 182; 15-20 février 1814, lieutenant-colonel Catinelli, Note sur l’armée napolitaine et le roi de Naples (texte originai en français).

(25)

A. und. K. Kriegs-Archiv (Feld-Acten Bellegarde), II, 144 1/2 c, et Record Office, War Office, Sicily, V(e) 182. Le feld-maréchal comte de Bellegarde à lord William Bentinck; Villafranca, lo février 1814 (texte originai en français)

(26)

Il s’agit ici de la convention de démarcation signée à Bologne, le 7 février, par les généraux Livron et Nugent (Archives des Affaires étrangères. Naples, V* 140, p(re) 57, f° 108. Record Office. War Office. Sicily. V(u) 182; et Regio Archivio di Stato. Naples. Sezione Guerra» 1056. Amministrazione delle Marche).

(27)

K. u. K. Kriegs-Archiv (Feld-Acten Bellegarde), 11, 144. Le feld-maréchal comte de Bellegarde à l’empereur François; Villafranca, 16 février 1814.

(28)

Le feld-maréchal fait ici allusion à la pièce qui. désignée sous le nom de projet de coopération, etc., en date de Naples, 2 février 1814, fut complétée par la Minute de Catinelli.

(29)

Bellegarde fait ici allusion à la pièce que nous venons de reproduire ci-dessus.

(30)Record Office, War Office, Sicily, V182, Lord William Bentinck au comte Bathurst; Palerme, 27 février 1814.

(31)

Tascher de la Pagerie, le Prince Eugène. Réfutation des Mémoires du duc de Raguse, etc., pp. 19-20.

(32)

Cf. Annesse XXVII. Rapport du colonel comte Tascher de la Pagerie au vice-roi; Volta, 25 février 1814.

(33) Archives de la Guerre. Le vice-roi au due de Feltre; Volta, 16 février 1814.

«Je reçois à l’instant même votre lettre du 9 de ce mois, dans la quelle vous me faites part des intentions de Sa Majesté à l’égard de l’armée sous mes ordres, dès que le roi de Naples se sera déclaré contre la France. Vos informations sont entièrement conformes à celles que l’empereur m’a adressées, il y a environ quinze jours, par une lettre chiffrée. J'agirai ponctuellement en ce sens.

«Jusqu’à ce moment, les Napolitains ne peuvent entrer en opération, puisque, bien que le roi ait fait un traité avec l’ennemi, il en attend la ratification; et j’ai pris toutes mes mesures pour être prévenu à temps.

«Ainsi donc, mon mouvement rétrograde, qui n’est d’ailleurs que conditionnel, sera le plus lent possible, à moins que, la présence de mon armée étant jugée nécessaire en France, vous ne me fassiez parvenir l’ordre positif de m’y porter.

«Je vous ferai observer que, dans cette hypothèse, vous devez vous attendre a une diminution à peu près des deux tiers de mes forces, puisque vous savez que mes régiments sont, en grande majorité, composés de Piémontais, Génois, Toscans, etc...»

(34)

Cf. Journal du bacon con Hugel. 16 février «... Wilson est très actif et en relation immédiate avec lord Bentinck. Il faut espérer que ce dernier seconde d’une manière énergique ses opérations...»

(35)

Regio Archivio di Stato Parme (Interno, Carte delle Prefetture Francese). Maire de Fiorenzuola au préfet; Fiorenzuola, 26 février 1814. La ville a été occupée, le 15 février, par les postes du général Severoli. Le 16, l’avant-garde autrichienne, après avoir tiraillé jusqu’à cinq heures du soir, entrait à Fiorenzuola où le général Starhemberg resta jusqu’au 25 au soir. Cf. Regio Archivio di Stato, Modène (Archivio Estense Tassoni); Lettere private del Senatore Testi al Barone. Giulio Cesare Tassoni.

(36)

A”, und K. Kriegs-Archiv. Operations Journal der K. K. Armee, 16 février, XIII, 3-4. — Journal des detachirten Corps des General-Majors Grafen Nugent, 16 février, XIII, 38. — capitaine Virgilio au commandant des avant-postes autrichiens; San Benedetto, 16 février, II, 156 c.— Regio Archivio di Stato, Milan. Appendice Storia, 47.— Vice-préfet duHaut-Pò au Ministre de Tlntérieur; Crémone, 17 février. — Regio Archivio di Stato, Naples, 1056. Amministrazione delle Marche. Général d’Ambrosio au général Millet; Modène, 16 février.

Regio Archivio di Stato, Reggio, I, xm (Militare e Guerra, Rub.lX) général Campana au podestat de Reggio; Reggio, 15 février. Il lui donne avis de«l’arrivée à Reggio, vers les deux heures de l’après-midi,de 6.000 hommes d’infanterie, 1.000 hommes de cavalerie et de 4généraux, dont 2 de division». Au même moment le podestat dimoia faisait savoir au vice-préfet que 2.000 hommes d’infanterie et 700 chevaux venant de Faenza allaient arriver le jour même. D'autre part, 3 bataillons de la garde royale venant de Florence étaient attendus et annoncés à Bologne pour le 16 février (Regio Archivio di Stato. Bologne. Tit. 17, Rub. 12). Cf. Regio Archivio di Stato, Modène.

(37)

Archives de la Guerre. Général Pouchain au ministre de la Guerre; Génes, 25 février. —Carnet historique et littéraire (décembre 1898). Princesse Elisa au prince Camille, Lucques; 16 février.

(38)

Archives de la Guerre. Princesse Elisa au ministre de la Guerre; Lucques, 16 février. Prince Félix au général Dalesme, commandant File d’Elbe; Pise, 16 février.

(39)

K. u. K. Kriegs-Archiv. Operations Journal der K. K. Armee; février, XIII, 3-, XIII, 4. F.-M..L. Mayer von Heldenfeld, Geschichte der Vorriickung der K. K. Armee Uber die Etsch, etc., XIII, 6 et Journal du baron von Hugel.

«...On dit que l’armée ennemie établit des fortifications sur la rive droite du Mincio vis-à-vis de Valeggio.»

(40)

Voir Annexe XXVIIL Journal du baron von Hugel «Le F.-M.-L.Pflacher est nommé pour signer au lieu du maréchal les affaires courantes.»

(41)

Archives de la Guerre. Le vice-roi au due de Feltre; Volta, 18 février K. u. K. Kriegs-Archiv. Operations Journal der K. K. Armée, XIII, 3, XIII, 4 (Feld. Acten Bellegarde), F.-M.-L. marquis Sommariva au F.-M. comte Bellegarde, San Giorgio, 17 février, sept heures et demie soir, II, 166 et II, 107 (Feld-Acten Sommariva). Major Masberg au F.-M.-L. marquis Sommariva. Toscolano, 16février, II, 157. — Regio Archivio di Stalo, Milan, Appendice Storia, Général Lechi, Rapport sur les affaires de Salo et de Maderno. Desenzano, 24 février 1824.







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Le développement inégal et la question nationale (Samir Amin)










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