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SILENT ENIM LEGES INTER ARMA - la legge sugli assembramenti affonda le sue radici... (Zenone di Elea -Dicembre 2021)

RÉPERTOIRE GÉNÉRAL ET RAISONNÉ DU DROIT CRIMINEL

OU SONT MÉTHODIQUEMENT EXPOSÉES LA LÉGISLATION, LA DOCTRINE ET LA JURISPRUDENCE SUR TOUT 

CE QUI CONSTITUE LE GRAND ET LE PETIT CRIMINEL EN TOUTES MATIÈRES ET DANS TOUTES LES JURIDICTIONS

PAR

ACHILLE MORIN

DOCTEUR EN DROIT, AVOCAT AU CONSEIL D'ÉTAT ET A LA COUR DE CASSATION

JUGE DE PAIS SUPPLÉANT, A PARIS

Rédacteur du journal du Droit criminel, auteur du Dictionnaire du Droit criminel et du traité de la

Discipline des Cours et Tribunaux, du Barreau et des Corporations d'officiers publics

PARIS

CHEZ A. DURAND, LIBRAIRE-ÉDITEUR

RUE DES GRÈS, 5

1850

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ATTROUPEMENTS

ATTROUPEMENTS. — 1. Quelque libérale que soit la Constitution politique d’un pays, elle ne doit admettre l’exercice du droit de réunion que dans des limites qu’imposent nécessairement le respect dò aux droits d’autrui et les exigences de la sécurité publique. — V. Associations et Réunions.

La tranquillité publique est compromise, lorsqu’il se fait publiquement contre le vœu de l’autorité locale des rassemblements tumultueux ou arméspeut-être ont été méchamment concertés ou provoqués, d'où peuvent sortir des cris séditieux ou condamnables, qui peuvent tendre à une démonstration agressive, à l’insurrection même; et cela, encore bien qu’il n’y ait pas une organisation hiérarchique et un plan arrêté, comme il le faut pour constituer l’un des crimes ou délits dont nous démontrons ailleurs les éléments constitutifs. — V. Association de malfaiteurs, Bandes armées, Insurrection, Sédition.

Tout rassemblement de cette nature, sur la voie publique,est un attroupement,suivant la dénomination distinctive qu’on trouve dans les lois et règlements sur cet objet. S’il est inoffensif, on peut n’y voir qu’un obstacle à la libre circulation, que l’action ordinaire de la police pourra faire cesser. Dès qu’il compromet la sécurité publique, par le nombre et l’attitude de ceux qui le composent, il devient illicite en lui-même, indépendamment de tout autre délit. Mais il est plus ou moins punissable, selon qu’il recèle ou non des armes, selon qu’il résiste plus ou moins longtemps et avec plus ou moins de violence aux injonctions de l’autorité ou à la force publique. De là, nécessité d’une loi spéciale, réglant les moyens de répression, eu égard aux circonstances de temps et de lieu, en tenant compte aussi des libertés constitutionnelles.

§ 1(er). Historique.

§ 2. Législation actuelle.

__________

§ 1(er) — Historique

2. La législation romaine n’avait, sur les attroupements, que quelques dispositions éparses. Elle réputait hostiles à l’État les réunions très-nombreuses qui occupaient la voie publique, convocatis hominibus;et elle punissait, comme crime de lès emajesté, le fait d’avoir pris part à un attroupement dirigé contre la République méme (V. L. 3, L. Sett. 10, § 1, ff., ad leg. Jul. de vi publica;L. 2, ff., de colleg. illicit.\L. 1, $ 1, ff., ad leg. Jul. majest.)Mais c’était de l’arbitraire, sans justice exacte, à notre point de vue.

Dans l’ancienne législation française, quelques édits ou déclarations défendaient les conventicules,armés ou non (édits de 1529,1567 et 1651), et punissaient surtout les attroupementsformés pour faciliter la contrebande ou toute autre fraudeau fisc(déclar. des 30 janv. 1717 et 2 juill. 1723); outre que l’on réprimait arbitrairement les faits qualifiés de séditionou émotion populaire(Voy. Jousse, Justice crim.,t. 4, p. 106). Il y avait aussides arrêts de parlement (7 sept. 1778, 22 mai 1779, 3 dèe. et 4 mai 1781), défendant et punissant, surtout au cas de violences, les attroupements d’ouvriers dans les rues et carrefours, et même les rassemblements non autorisés pour jeux ou fêtes baladoires (Ibid, t. T(r), p. 192, et t. 3, p. 458; Merlin, Rèp.,v(is)Assemblées, Attroupements, Fêtes).

3. En 1789, l’agitation continuelle du peuples rendu nécessaire une loi spéciale, qui donnât au pouvoir le moyen de résister aux exigences tumultueuses, et le soumit toutefois à des ménagements envers les individus attroupés. Ce fut l’objet d’un décret de l’Assemblée nationale, rendu le 31 octobre, approuvé le 21 novembre, et devenu célèbre sous le nom de loi martiale.En voici les dispositions: Lorsque la tranquillité publique était mise en péril, des officiers municipauxétaient tenus de déclarer que la force militaire allait être employée pour rétablir l’ordre (art. 1(er)). Cette déclaration se faisait, en exposant à la maison de ville et dans les rues un drapeau rouge, signal qui rendait tous attroupements criminels et autorisait à les dissiper par la force (2 et 3). Un officiermunicipal, accompagné des forces requises, devait demander aux personnes attroupées quels étaient leurs griefs; elles pouvaient déléguer six d’entre elles pour les exposer; faute par les autres de se disperser, il était fait trois sommations successives; la force des armes pouvait être employée, si l’attroupement commettait des violences pendant les sommations ou ne se dispersaitpas entièrement à la dernière (4, 5, 6 et 7). Les instigateurs seuls pouvaient être poursuivis et étaient passibles de trois ans de prison ou de la peine de mort, selon que l’attroupement était ou non armé, dans le cas où il se retirait paisiblement, sans avoir commis aucune violence (8). Au cas de violence ou de résistance, ceux qui échappaient aux coups de la force militaire et qui pouvaient être arrêtés, devaient être punis, savoir: d’un an de prison, s’ils étaient sans armes; de trois ans, s’ils étaient armés; de mort, s’ils avaient commis des violences ou étaient des instigateurs de la sédition (9). Tous militaires ou gardes nationaux ayant excité et fomenté des attroupements, émeutes ou séditions, étaient déclarés rebelles et passibles de la peine capitale; tous ceux qui auraient refusé le Service requis devaient être dégradés et punis de trois ans de prison (10). Après le calme rétabli, procès-verbal devait être dressé, un arrêté devait taire cesser la loi martiale, et le drapeau rouge devait dire remplacé, pendant huit jours, par un drapeau blanc (11 et 12).

Cette loi n’était que pour les cas de périlextrême, si bien qu’il fallut un décret particulier pour autoriser son application à ceux où il s’agirait de protéger les personnes ou les propriétés, ou bien la perception des impôts, compromise par des attroupements séditieux (décr. 23 fév. 1790). Et die était bien rigoureuse, non-seulement dans ses pénalités, mais aussi dans ses dispositions sur l’emploi de la force, à en juger par l’exécution que lui donnèrent Bailly et Lafayette au Champ-de-Manate 17 juill. 1791. D’autres dispositions législatives durent être décrétées pour atteindre, d’une part, les attroupements constituant une véritable sédition; d’autre part, ceux qui n’auraient de gravite que par le danger qui pourrait en résulter fortuitement. Dès le 18 juillet, un décret de l’Assemblée nationale intervint contre les séditions: il déclara séditieuse toute provocation à la désobéissance aux lois, dans les lieux publics (art. 1(er)); il prononça trois ans de chaîne et même la peine de mortselon le résultat, pour toute provocation au meurtre dans un attroupement (art. 2); enfin, il réputa cri de sédition, passible de deux ans de prison, tout cri contre la garde nationale ou la force publique en fonctions, tendant à lui faire baisser ou déposer ses armes (art. 3). Et, aux dates des 26 et 27 juillet, il fut rendu un décret contre les attroupementsapprouvé le 3 août, dont voici les dispositions résumées: La gendarmerie, la garde soldée des villes, et même les simples citoyens, étaient appelés àarrêter toutes personnes surprises en flagrant délit, à empêcher toutes révoltes et tous attroupements séditieux (art. 1-8). La loi réputait attroupement séditieuxtout rassemblement de plus de quinze personnes s’opposant à l’exécution d’une loi, d’une contrainte ou d’un jugement (art. 9). Elle chargeait la gendarmerie, les gardes soldées et les citoyens qui se trouveraient de Service en qualité de gardes nationaux, de dissiper les attroupements séditieux formés contre la perception des contributions, etc. (art. 10). Elle voulait que les dépositaires de la force publique n’employassent la force des armes que dans trois cas: 1° si des violences ou voies de fait étaient exercées contre eux-mêmes; 2° s’ils ne pouvaient défendre autrement le terrain qu’ils occupaient ou les postes dont ils étaient chargés; 3* s’ils y étaient expressément autorisés par un officier civil, après trois sommations en ces termes: «Obéissance à la loi; on va faire usage de la force; que les bons citoyens se retirent» (art. 25, 26 et 27). De plus, cette loi conservait, mais seulement pour les attroupements successifs, la loi d’octobre 1789, par un article additionnel ainsi conçu: «La loi martiale continueraà être proclamée lorsque la tranquillité publique sera habituellement menacée par des émeutes populaires ou attroupements séditieux qui se succéderaient l’un l’autre. Pendant le temps que la loi martiale sera en vigueur, toute réunion d’hommes au-dessus du nombre quinze, dans les rues ou places publiques, avec ou sans armes, sera réputée attroupement.»

Ces dispositions législatives se trouvaient fortifiées par celles des lois organiques qui chargeaient expressément les officiers municipaux, la gendarmerie et les gardes nationales, sous la responsabilité des communes, de dissiper les «attroupements et émeutes populaires», les «révoltes et attroupements séditieux» (L. 16-24 août 1790, art. 6; décret 16 janv. 1791, tit. 8, art. l(er)); ainsi que par les dispositions de la loi correctionnelle et du Code pénal qui édictaient des pénalités progressives contre les «bruits ou attroupements nocturnes», les «rixes avec ameutement», les «attroupements avec rébellion», et les «attroupements armés qui ne s’étaient pas dissipés après les sommations» (L. 19 juill. 1791, tit. 1(er), art. 19, et tit. 2, art. 2630; C. pén., 25 sept. 1791, 2° partie, tit. 1(er), sect. 4, art. 1-6).

4. Mais en 1793, la Convention, qui admettait l’insurrection comme un droit dans certains cas, et qui considérait les émeutes populaires comme un moyen de gouvernement, abrogea la loi de 89 par un décret ainsi conçu, sans préambule: «La Convention nationale, sur la proposition d’un de ses membres, décrète que la loi martiale est abolie.» Toutefois, la loi d’août 1791, réglant l’emploi de la force contre les attroupements, demeura en vigueur et trouva une sanction suffisante dans les dispositions pénales de certaines lois spéciales et du Code des délits et peines sur les rassemblements répréhensibles (décr. 7 août 1793, 1(er)germ. an in, 24 germ. et 3 brum. an IV),ainsi que dans les lois et arrétés du Directoire, conservant ou conférant à la gendarmerie, à la garde nationale, aux préfets et commissaires généraux de police, tous pouvoirs pour prévenir ou dissiper les attroupements et les réunions tumultueuses (L. 28 germ. an VI, art. 125; arrêtés 13 fior, an vii, 12 mess. an vm et 3 brum. an IX).

Cette loi spéciale ne fut pas positivement abrogée par le Code pénal de 1810, qui ne s’occupe des attroupements qu’au point de vue des associations ou bandes ayant une organisation criminelle; et elle trouva une nouvelle consécration dans l’ordonnance sur la gendarmerie, du 29 oct. 1820 (art. 179), ainsi que dans la loi sur la garde nationale, du 22 mars 1831 (art. 1 et 127).

5. La révolution de 1830 ayant amené de nouveaux troubles, il a paru nécessaire d’introduire dans la législation sur les attroupements des modifications qui, armant la société de pénalités légères pour les cas les moins graves, lui donnassent les moyens de rendre inutile l’emploi rigoureux de la force, sauf dans les cas extrêmes. En conséquence, un projet de loi a été présenté et discute aux deux Chambres législatives, qui l’ont adopté à une grande majorité (voy. Monit.18 mars-8 avril 1831); et le gouvernement a promulgué, le 10 avril 1831, la loi votée, dont voici les dispositions en résumé: Toutes personnes qui formeront des attroupements sur la voie publique seront tenues de se disperser, à peine d’y être contraintes par la force, après sommations faites conformément à la loi d’août 1791 (art. 1). Ceux qui resteront après la première sommationpourront être arrêtés et seront condamnés à des peines de simple police (art. 2). Après deux sommations, la peine pourra être de trois mois de prison, et après la troisième, d’un an (art. 3). Les chefs et provocateurs de l’attroupement seront punis de trois mois à deux ans de prison, s’il ne s’est point entièrement dispersé après la troisième sommation; la même peine sera encourue par tous individua porteurs d’armes apparentes ou cachées, s’ils ont continué à faire partie de l’attroupement après la première sommation (art. 4). Si ces individus n’ont pas leur domicile dans le lieu de l’attroupement, le juge pourra les obliger à s’en éloigner pendant un an, et s’ils y reparaissent, les condamner à l’emprisonnement pendant le temps qui restera à courir (art. 5 et 6). Toute arme saisie sera confisquée (art. 7). Si l’attroupement a un caractère politique, les coupables pourront être interdits pendant trois ans de l’exercice des droits mentionnés dans les quatre premiers paragraphes de l’art 42 C. pén. (art. 8). Après les trois sommations, tous ceux qui font partie de l’attroupement sont solidairement responsables des dommages causés (art. 9). Les délits commis sont justiciables de la police correctionnelle ou des cours d’assises, selon que l’attroupement a ou non un caractère politique (art. 10). Si des crimes ou délits plus graves sont commis, leurs auteurs ou complices encourent la peine la plus forte (art. 11et dernier).

On le voit, le principe de cette loi était de punir l’attroupement (quel que fût son but), ou plutôt la désobéissance aux injonctions de l’autorité faisant les sommations, avec gradation dans la pénalité selon que la désobéissance était plus ou moins persévérante. Du reste, la loi d’août 1791 était maintenue dans ses dispositions sur l’emploide la force publique, ainsi que le déclaraient expressément l’exposé des motifs présenté aux deux Chambres par M. Barthe, garde des sceaux, et les rapports de MM. de Schonen et de Choiseul (séances des 18 et 26 mars, 5 et 7 avril 1831).

6. La révolution de 1848 n’a pas dû détruire de plansune loi qui protégeait la société entière, et qui devait protéger le nouveau gouvernement lui-même. Mais, après que cette loi avait été méconnue d’une manière flagrante ( on sait que le fameux manifeste du 21 février provoquait un attroupement considérable), il était difficile de l’applique r sans un vote nouveau à des attroupements qui se prétendaient légitimés par la victoire populaire; aussi, le gouvernement provisoire et la commission exécutive, dès qu’ils eurent compris que l’abus du droit de réunion compromettait leur existence même, ont-ils jugé nécessaires des actes officiels, pour proclamer que l’abus devait tomber sous le coup des lois de police et de répression protégeant la cité (voy. procl., 14 mai 1848; Bull, des lois,n° 382). D’ailleurs, un autre système de répression a para devoir être adopté; et voici comment il a été justifié dans l’exposé des motifs présenté par M. Recurt, ministre de l’intérieur:

«… Tout droit a ses limites naturelles et légitimes,dans le droit d’autrui, dans l’intérêt general. Le droit de réunion ne doit donc être respecté qu’à la condition de ne pas froisser le droit d’autrui, et surtout de ne pas compromettre, dans son développement, l’ordre, la paix publique, le crédit et le travail. Si, dans une telle situation, au lieu de céder au grand principe de salut public, il cherche à s’imposer par la force, non-seulement alors il cesse d’être légitime, mais il peut devenir coupable. La société alors doit s’armer pour défendre l’intérêt général menacé et rétablir entre tous les droits, entre tous les intérêts, l’équilibre que l’égoïsme voudrait rompre... Le projet distingue avec soin le droit de l’abus du droit. Dans l’abus, il distingue encore. Les réunions, les attroupements sur la voie publique, ne sont pas, on le conçoit, toujours coupables; ils ne sont pas surtout toujours coupables au même degré. Il y a certaines réunions qui peuvent géner la circulation; cela est toujours fâcheux et peut même, dans certains cas, constituer une contravention de police; mais si ces réunions ont lieu sous les inspirations spontanées et pacifiques d’un droit à défendre, si surtout elles sont calmes et disciplinées, elles doivent appeler l’attention sans doute, mais elles ne sauraient motiver des répressions. Au contraire, si elles prennent un caractère tumultueux et passionné; si, au lieu de céder devant les conseils et les injonctions de l’autorité, elles résistent, alors la situation change, et les passions désordonnées des partis ne sauraient être traitées à l’égal du droit, qui se pose et se défend en conservant toujours son attitude ferme et digne. — Cependant, il y a dans ces manifestations et dans la résistance qu’elles opposent des degrés qu’il faut tenir en grande considération. L’attroupement non armé, par cela seul qu’il trouble la tranquillité publique, est un acte mauvais, compromettant, au point de vue social: il n’attaque pas, il est vrai, mais il menace; or la société ne doit jamais être menacée; cet acte, il faut donc le faire cesser. 11 n’a pas toutefois le même caractère que l’attroupement armé, et dès lors il ne peut appeler les mêmes répressions. L’attroupement arme constitue un état de guerre; il ne menace pas seulement, il attaque; c’est la force brutale qui se manifeste au grand jour et se met en hostilité directe avec la société. C’est en distinguant ces cas que le projet a dû voir dans l’attroupement armé un crime, dans l’attroupement non armé un délit. Ila dû aussi ouvrir les voies à la réflexion. Cette réflexion, l’autorité publique, par son intervention solennelle, la provoque et la conseille. Si l’attroupement se dissipedevant ces conseils, le délit s’atténue, le crime s’efface; s’il y résiste, les peines s’élèvent, car l’acte prend alors un caractère plus grave et plus menaçant. — En punissant les citoyens faisant partie des attroupements armés et non armés, la loi devait atteindre également ceux qui les ont provoqués. La provocation est donc punie; elle l’est des mêmes peines qui atteignent le crime et le délit; le provocateur n’a pas même, en effet, l’entraînement pour cause.»

Le projet ainsi expliqué, soutenu devant l’Assemblée nationale par M. Marie, membre du gouvernement intérimaire, a été par elle adopté avec quelques modifications secondaires, à la majorité de 478voix contre82, dans la séance du 7 juin. Le décret a été sous cette date promulgué, avec une proclamation pouvant faire supposer que c’était une loi de circonstance, dirigée contre des agitateurs réactionnaires; mais, quoiqu’il fùt voté d’urgence, ce décret, dans la pensée de l’assemblée nationale, a été une loi définitive et permanente, rendue pour maintenir l’ordre envers et contre tous, ainsi que cela résulte de la discussion, et surtout du rejet d’un amendement qui tendait à la rendre inerte après un an (voy. Moniti8 juin 1848, p. 1291-1298).

§ 2. — Législation actuelle

7. Tout attroupement armé, formésur la voie publique, est interdit. Est également interdit, sur la voie publique, tout attroupement non armé qui pourrait troubler la tranquillité publique (L. 7 juin 1348, 1).

C’est seulement sur la voie publique,qu’un rassemblement d'hommes peut constituer un attroupement.La voie publique com prend, avec les raies et places, avec les routes et chemins publics, tout terrain non clos qui y est attenant et en dépend, dès qu’il est accessible à tous.

L’interdiction contre les attroupements armés est absolue, et sans aucune restriction quelconque. L attroupement non armé n’est interdit qu’autant qu’il pourrait troubler la tranquillité publique. Mais à quels signes reconnaître la possibilitédu trouble? Un amendement,basé sur la supposition que le droit de réunion permet tout attroupement qui ne cause pas un trouble réel, tendait à ne faire déclarer illicite un attroupement non armé qu’autant qu’il aurait troubléla tranquillité par des faits; il a été écarté, par le motif qu’une loi de police devait être préventive plutôt que répressive, qu’il ne fallait pas attendre que la foule eût consommé un envahissement comme au 15 mai (Monit.,8 juin). Un autre amendement, puisé dans la loi de 1791, voulait que Fon n’atteignit que les attroupements qui auraient un caractère séditieux,afin qu’il n’y eût pas de doute dans l’esprit du magistrat chargé d’appliquer la loi; l’Assemblée a préféré et maintenu les termes du projet (Ibid.).C’est donc à l’officier municipal, ayant mission de dissiper l’attroupement, qu’appartient l’appréciation de la possibilité du trouble et de l’opportunité du recours à la force.

Ainsi entendue, la loi nouvelle franche la question de nombre, qui était précédemment agitée. Sous la loi de 1791, il fallait au moins quinze personnes pour constituer l’attroupement prévu; et l’art. 291, C. pén., ne s’appliquait qu’aux associations de plus de vingt personnes. La loi de 1831 n’ayant rien dit, quant au nombre, n’y avait-il pas lieu de se référer à la loi de 91? Cela paraissait convenable, d’autant mieux que les art. 9 et 27 de cette loi, qui fixaient le nombre à quinze au moins, n’avaient point été abrogés par la loi de 93, comme la loi martiale de 89 et l’article additionnel de la loi de 91. Cependant, lors de la discussion de 1831, réfutant un amendement qui tendait à exiger plus de vingt personnes, M. Thil avait dit: «Ne peut-il pas se présenter une multitude de circonstances où une réunion de dix-neuf, dix-huit ou quinze individus, aurait un caractère coupable? Dixhommes réunis, par exemple, ne pourraient-ils pas causer un dommage irréparable? N’envisageons pas toujours les attroupements par rapport à la capitale; reportons-nous dans les provinces. II est certain que, dans beaucoup de localités, les rassemblements de dix, douze, quinzepersonnes, pourraient troubler essentiellement la tranquillité publique, et que les officiers de l’ordre administratif ou judiciaire seraient dans la nécessité d’agir.»

Cette observation n’ayant point passé dans la loi de 1831, et la loi de 91 ayant été maintenue, il fallait sans doute s’en tenir au minimumfixé. Mais la loi de 91 étant aujourd’hui remplacée par une loi complète, qui s’en est rapportée au magistrat, toute question de nombre doit paraître écartée désormais.

8. L’attroupement est armé:1° quand plusieurs des individus qui le composent sont porteurs d’armes, apparentes ou cachées; 2° lorsqu’un seul de ces individus porteur d’armes apparentes, n’est pas immédiatement expulsé de l’attroupement par ceux-là mêmes qui en font partie (L. 1848, 2).

Dans le projet, cet article ne venait qu’après un art. 2, qui disait: «L’attroupement armé constitue un crime, s’il ne se dissipe pas à la première sommation», lequel a été écarté comme contenant une définition dangereuse et d’ailleurs inexacte (Monit.,p. 1292). Alors, il était lui-même susceptible des plus sérieuses critiques, en ce que les règles rationnelles de l’imputabilité ne permettent pas, malgré quelques déviations dans nos lois pénales, de rendre tous les co-auteurs d’un fait peu grave responsables indistinctement d’une circonstance aggravante à laquelle ils sont étrangers pour la plupart, et que la plupart même peuvent avoir ignorée. Mais, outre que la définition qui préjugeait la criminalité a été entièrement écartée, des distinctions ont été introduites dans la disposition distribuant les peines (inf.,n° 10). — V. Complicité.

Toutefois, il fa ut le reconnaître, cet art. 2 est encore exorbitant, en ce qu il fait résulter la qualification d’attroupement arméde cela seul qu’il y a des armes quoique cachées, tandis que le Code pénal lui-même exige des armes apparentes,dans sa disposition sur la rébellion, portant: «Toute réunion d’individus pour un crime ou un délit est réputée réunion armée, lorsque plus de deux personnes portent des armes ostensibles» (art. 214). Et c’était avec quel que raison qu’un représentant insistait sur cette observation, que l’attroupement est une masse compacte rassemblant des individus qui ne connaissent pas tous l’attitude des premiers venus (Monitip. 1293). Mais, ainsi que l’a fait remarquer M. Marie, et que l’a parfaitement compris la majorité, il faut donner au pouvoir toute la force nécessaire vis-à-vis des attroupements suspects, en laissant aux tribunaux toute latitude pour une intelligente distribution des peines édictées, selon la position particulière de chacun des individus arrêtés. Quant à la seconde hypothèse de Kart. 2, si elle va encore au delà de l’art. 214, C. pén., c’est qu’elle implique une connaissance positive du but coupable de l’attroupement; et d’ailleurs, les distinctions de l’art. 4 doivent pourvoir à ce que veut la justice. — V. Armes.

Lorsqu’un attroupement armé ou non armé se sera formé sur la voie publique, le maire ou l'un de ses adjoints, à leur défaut le commissaire de police ou tout autre agent ou dépositaire de la force publique et du pouvoir exécutif, portant l’écharpe tricolore, se rendra sur le lieu de l’attroupement. Un roulement de tambour annoncera l’arrivée du magistrat. Si l’attroupement est armé, le magistrat lui fera sommation de se dissoudre et de se retirer. Cette première sommation restant sans effet, une seconde sommation, précédée d’un roulement de tambour, sera faite par le magistrat. En cas de résistance, l’attroupement sera dissipé par la force. Si l’attroupement est sans armes, le magistrat, après le premier roulement de tambour, exhortera les citoyens à se disperser. S’ils ne se retirent pas, trois sommations seront successivement faites. En cas de résistance, l’attroupement sera dissipé par la force (L. 1848, 3).

Cette disposition se justifie par les motifs qui ont successivement dicté les lois de 1789, 1791, 1831 et 1848. Les innovations qu’elle apporte en quelques points s’expliquent par la distinction entre les attroupements armés et les attroupements non armés, qui est le principe de la loi nouvelle. Pour les premiers, l’emploi de la force est autorisé après deux sommations; pour les autres, il faut une exhortation et trois sommations successives.

L’exhortation et les sommations, pour lesquelles il n’y a plus de formule sacramentelle, doivent émaner d’un fonctionnaire ou magistratayant la qualité de dépositaire de l'autorité publique (malgré les expressions vicieuses de l’article), c est-à-dire d’un maire ou adjoint, ou d’un commissaire de police, ou bien d’un préfet ou sous-préfet (voy. L. de 1831, art. 1(er)); et il faut que ce soit un fonctionnaire du ressort,car ou ne peut généraliser la disposition exceptionnelle de l’art. 12, C. instr. cr., spéciale pour les commissaires de police des communes divisées en plusieurs arrondissements. Le fonctionnaire doit être décoré de l’écharpe tricolore,signe distinctif et national, qui dispense de tout autre, mais qui est indispensable (Cass. 8 mai 1834; J. cr., art. 1373). Le roulement de tambourest nécessaire, pour appeler l’attention. Les sommationssont de toute nécessité, pour légitimer l’emploi de la force et pour rendre punissable comme délit ou crime l’attroupement subsistant; et cela, sans qu’il soit permis d’y suppléer par des cris, excepté toutefois quand il y a impossibilité absolue pour le magistrat de faire entendre ses paroles. Voy.L. de 1791, art. 27; C. d’ass. de la Seine, 8 nov. 1831; Grenoble, 17 avr. 1832; Cass. 3 mai 1834 (J. cr.,art. 811,926 et 1373).

10. Quiconque aura fait partie d’un rassemblement armé,sera punicomme il suit: Si l’attroupement s’est dissipé après la première sommation et sans faire usage de ses armes, la peine sera d’un mois à un an d’emprisonnement. Si l’attroupement s’est formé pendant la nuit, la peine sera d’un an à trois ans d’emprisonnement. Néan-moins, il ne sera prononcé aucune peine pour fait d’attroupement contre ceux qui, en ayant fait partie, sans ette personnellement armés, se seront retirés sur la première sommation de l’autorité. Si l’attroupement ne s’est dissipé qu’après la deuxième sommation, mais avant l’emploi de la force, et qu’il ait fait usage de ses armes, la peine sera de un à trois ans, et de deux à cinq ans si l’attroupement s’est formé pendant la nuit. Si l’attroupement ne s’est dissipé que devant la force ou après avoir fait usage de ses armes, la peine sera de cinq à dix ans de détention pour,le premier cas, et de cinq à dix ans de réclusion pour le deuxième. Si l’attroupement s’est fait pendant la nuit, la peine sera la réclusion. L’aggravation de peine résultant des circonstances prévues par la disposition du § 5 qui précède, ne sera applicable aux individus non armés faisant partie d’un attroupement réputé armé, dans le cas d’armes cachées, que lorsqu’ils auront eu connaissance de la présence dans l’attroupement de plusieurs personnes portant des armes cachées, sauf l’application des peines portées par les autres paragraphes du présent article. Dans tous les cas prévus par les 3(e), 4°et 5(e)§ du présent article, les coupables condamnés à des peines de police correctionnelle pourront être interdits, pendant un an au moins et cinq ans au plus, de tout ou partie des droits mentionnés en l’art. 42, C. pén. (L. 1848, 4).

C’est ici que s’appliqueraient les critiques qui ont été dirigées dans la discussion contre l’art 2 du projet, s’il n’est pas été supprimé avec la définition exorbitante qu’il contenait, et si le nouvel art. 4 n’est pas été modifié par des distinctions rationnelles. La gradation des peines se trouve actuellement juste, malgré les objections qui ont été tirées de circonstances accidentelles, dès qu’il y a: 1° exemption de peines pour-ceux qui, n’étant pas personnellement armés, se sont retirés à la première sommation; 2°modération des peines en faveur de ceuxqui, lorsqu’il n’y avait que des armes cachées, n’en ont pas eu connaissance. Il est d’ailleurs entendu, quoique l’Assemblée ait repoussé un amendement explicatif, qu’aucune peine ne sera prononcée sans que l’accusé ait été déclaré coupablede tel ou tel des faits incriminés, puisque c’est une formule essentielle dans tout verdict affirmatif. Et, de plus, la peine encourue pourra toujours être modérée par l’admission de circonstances atténuantes.

La loi actuelle ne dit pas, comme le faisait celle de 1831, que les armes saisies seront confisquées. Mais, du moment où une arme a été employée à commettre un crime ou délit, la confiscation est de droit, suivant le principe dont on trouve l’application dans les art. 96 et suiv., 210 et suiv., 243 C. pén., et dans la loi du 24 mai 1834, sur les détenteurs d’armes et les munitions de guerre.—V. Armes, Confiscation.

11. Quiconque, faisant punie d’un attroupement non armé,ne Paura pas abandonnéaprès le roulement de tambour précédant la deuxième sommation, sera punid’un emprisonnement de quinze jours à six mois. Si l’attroupement n’a pu être dissipé que par la force, la peine sera de six mois à deux ans (L. 1848, 5).

Le projet proposait pour peines trois mois à un an dans le premier cas, treize à dix-huit mois dans le deuxième. C’est avec raison que la penai ite a été modérée d’une part, et que, d’autre part, une plus grande latitude a été donnée au juge pour un cas qui peut présenter une grande diversité de positions. Ainsi abaissée, la pénalité est encore plus rigoureuse que ne l’était celle de la loi de 1831, qui ne punissait que de peines de simple police ceux qui seraient restés dans l’attroupement, armé ou non, après la première sommation. Mais il faut remarquer que cet art. 5 ne permet d’arrêter et punir que ceux qui n’auraient pas abandonné l’attroupement après le roulement de tambour précédant la deuxième sommation.Et d’ailleurs, le juge pourra abaisser la peine, par application de Part. 463, C. pén.

12. Toute provocation directeà un attroupement armé ou non armé, par des discours proférés publiquement et par des écrits ou des imprimés, affichés ou distribués, sera punie comme le crime et le délit, selon les distinctions ci-dessus établies. Les imprimeurs, graveurs, lithographes, afficheurs et distributeurs seront punis comme complices, lorsqu'ils auront agi sciemment. Si la provocation faite par les moyens ci-dessus n’a pas été suivie d’effets, elle sera punie, s’il s’agit d’une provocation à un attroupement nocturne et armé, d’un emprisonnement de six mois à un an; s’il s’agit d’un attroupement non armé, l’emprisonnement sera de un mois à trois mois (L. 1848, 6).

Cet article a été l’objet d’une discussion assez confuse, dans le cours de laquelle une disposition votée a été modifiée sensiblement, mais avec raison. Le projet n’exigeait pas que la provocation fùt directe;cette condition a dû être exprimée, pour trancher la controverse qu’avait soulevée l’affaire Dupoty (voy. J. cr.,art. 2983). Un amendement tendait même à ajouter l’expression formelle:elle a été jugée inutile. Le projet n’exigeait pas non plus que les discours provocateurs eussent été proférés,qu’ils l’eussent été publiquement:cette doublé condition, qui se trouvait dans les lois de 1819 et 1822, a paru nécessaire pour empêcher l’espionnage et la délation, malgré des observations qui tendaient à démontrer la criminalité des provocations commises dans certaines réunions. A l’égard des imprimeurs, graveurs, etc., une discussion irritante a eu lieu sur les conditions constitutives de la provocation, et elle s’est terminée par l’adoption de cette locution, qui était sous-entendue dans le projet: «Lorsqu’ils auront agi sciemment» ( Monit.,p. 1297 et 1298). — V. Complicité, Provocation.

13. Les poursuites dirigées pour crime ou délit d’attroupement ne font aucun obstacle à la poursuite pour crimes et délits particuliers qui auraient été commis au milieu des attroupements (L. 1848, 7).

Cette réserve est de droit. Elle ne s’applique pas seulement aux crimes ou délits commis dans les attroupements armés,comme le proposait un amendement; car il se commet aussi dans les attroupements non armés des délits qui comportent une répression sévère, d’autant plus que leurs auteurs exploitent les agitations politiques au profit de leur honteuse industrie. Dans tous les cas, le juge doit respecter le principe du non cumul des peines, qui est applicable même aux matières spéciales, lorsqu’il n’y a pas de dérogation expresse. — V. Cumul.

14. L’art. 463, C. pén., est applicable aux crimes et délits prévus et punis par la présente loi (L. 1848, 8). Cette disposition est générale. Son application appartient au jury ou à la cour d’assises seule, selon qu’il s’agit de crime ou de délit, suivant ce qui résulte de la combinaison des art. 463 C. pén. et 341 C. instr. cr.— V. Circonstances atténuantes.

La mise en liberté provisoire pourra toujours être accordée, avec ou sans caution (art. 9). En reproduisant l’expression pourra,qui domine l’art. 112 C. instr. cr., cette disposition rend facultative pour le juge la mise en liberté provisoire, suivant l’interprétation qui a prévalu en dernier lieu devant les chambres réunies de la Cour de cassation (arr. 23 fév. 1844; J. cr.,art. 3509). En permettant la mise en liberté sanscaution, elle applique largement le décret du 23 mars 1848, api a abrogé le l(er)§ de l’art. 119 C. instr. cr. — V. Liberté provisoire.

15. Les poursuites, pour crimes et délits d’attroupement, sont portées devant la cour d’assises (L. 1848, 10).

La loi de 1831 ne déférait au jury que les crimes ou délits qui résultaient d’un attroupement ayant un caractère politique(art. 10). La loi nouvelle lui attribue la répression des délits, sans distinction, à raison de ce que cette juridiction s’harmonise mieux avec les institutions républicaines. — V. Délits politiques.

L’art. 2 de 1831 prescrivaitde juger sans délai les contrevenants, par ce motif, qui eût pu être généralisé, qu’il ne fallait pas les détenir préventivement pendant un temps plus long que la durée possible de la peine encourue. La loi nouvelle ne décide rien à cet égard. Un représentant, reprochant à notre législation la longueur des détentions préventives, a propose de dire: «Les poursuites pour délits et crimes d’attroupement seront instruites d’urgence et portées devant les cours d’assises, à la première ou au plus tard à la seconde session qui suivra l’arrestation.» Cet amendement a été repoussé, à une grande majorité, après quelques paroles indiquant qu’il y aurait parfois impossibilité à procéder aussi rapidement (Monitip. 1298). — V. Cour d’assises.











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